A voté…

19 septembre 2012,

par Alain Hervé

Cette formule sacramentelle qui accompagne la chute du bulletin de vote dans l’urne donne une substance éphémère au phénomène dit démocratique.

L’auteur du choix exprimé se retire la poitrine gonflée de la sensation vertigineuse d’avoir participé à l’intronisation d’un nouveau chef de tribu. Un mécanisme obscurément mathématique  permet de proclamer en deux temps et trois mouvements  le nom d’un chef de l’Etat. Opération digne des plus éblouissants numéros de prestidigitation.

Foin de toutes ces simagrées régaliennes qui nécessitaient le doigt de Dieu pour désigner l’élu. Démodés la projection de saint chrême, la pose d’une lourde et coûteuse couronne sur un front douteux, le brandissement d’un sceptre pénien doré, la bénédiction d’un complice religieux agréé et mitré. Bazars démodés.

Puisque nous avons la chance unique de participer à l’époque moderne, privilège qui fut refusé à nos prédécesseurs, nous votons.

Devant le bureau de vote réglementairement aménagé dans une classe de Ce2 nous sommes gratifiés de cet orgasme citoyen qui nous saisit lorsque nous sommes invités à signer le registre hautement administratif que nous présente le responsable du bureau de vote.

La détumescence suit rapidement.
On réalise qu’ayant eu à choisir entre deux présidents possibles, dont aucun n’a la moindre idée de ce qu’est l’écologie, on a choisi le plus flou. Avec l’espoir qu’un jour il comprendra. Les jours, les mois passent… La nouvelle classe politique  additionne les milliards, retranche les chômeurs, multiplie par les kilowatts, divise par la fréquence des passages des rames de métro sur la ligne deux et sort triomphalement de son chapeau que dans deux, trois ans, cinq au pire tous les problèmes qui nous tracassent seront résolus. La démocratie fonctionne à plein régime.

Et pourtant nous persistons dans notre croyance en la démocratie. De même que nous n’avons pas cédé à la tentation facile et somme toute irresponsable de l’abstention, nous invoquons l’étymologie : démos cratos, appartenant au peuple nous nous trouvons impliqués dans la gouvernance de l’Etat. Et bien au delà du seul vote législatif.

De quelle manière ? Membres de la société civile, nous sommes représentés par les syndicats, les partis, les associations.

Les centaines d’associations environnementales et écologiques, voilà l’instrument de pouvoir des écologistes. De la défense de la marmotte à la défense de l’espèce humaine. Les syndicats disposent du droit de grève pour imposer leur volonté. Les écologistes disposent avec les associations du droit de boycott des décisions qui leur paraissent erronées.

Si nos élus d’un jour n’ont pas compris, nous sommes des centaines de milliers à avoir compris la menace d’un changement climatique brutal, l’épuisement des matières premières, l’accroissement démographique exponentiel de l’espèce humaine, le désastre sanitaire de l’agriculture chimique, la cancérisation du tissus urbanistique, la pénurie planétaire de l’eau potable, la dramatique menace nucléaire, l’ubuesque crise financière et économique…

Alain Hervé