Eurydice de Jean Anouilh au Théâtre 14

14 janvier 2014,

Par Michèle Valmont

En tirant « Eurydice » du purgatoire où semble relégué Jean Anouilh eurydice-theatre14_fitbox_200x200depuis un certain temps, Sam Richez et Jean-Laurent Cochet ont eu une riche idée.

Cette pièce, peu représentée, peut-être à cause de l’importante distribution qu’elle exige, transpose le mythe d’Orphée dans les années 1940. Orphée, jeune violoniste obscur, rencontre Eurydice, comédienne débutante, dans un buffet de gare. Leur coup de foudre va faire basculer l’action, alors ancrée dans une triviale réalité, dans une dimension poético-fantastique qui se terminera dans la mort.

Anouilh, de même que Giraudoux ou Sartre, s’amuse avec les mythes …antiques avec une virtuosité qui l’entraîne parfois vers quelques facilités dans les dialogues et une certaine lourdeur dans le déroulement de l’action. Faiblesses habilement masquées par l’excellente mise en scène de Sam Richez et Jean-Laurent Cochet : sobriété du décor, rideau noir et mobilier discret, direction d’acteurs exemplaire, clarté de jeu, simplicité gestuelle, tout est fait pour que les comédiens, tous anciens élèves de Jean-Laurent Cochet, soient le centre de l’attention du spectateur.

Norah Lehembre en Eurydice est convaincante dans son rôle ambigu d’amoureuse au passé glauque. Sam Richez est un Orphée fougueux, émouvant dans sa naïve jalousie. Mais l’intérêt principal réside dans les personnages dits secondaires : Jean-Laurent Cochet dans le rôle du père d’Orphée, envahit le plateau de sa truculente bonhomie. Cet homme joue comme il respire ! Catherine Griffoni, mère d’Eurydice, est d’une drôlerie communicative. Le personnage le plus étrange est Monsieur Henri, le passeur entre les deux mondes, le Ségeste de Cocteau magnifiquement incarné plus tard au cinéma par François Périer. Il n’est évidemment pas ici secondé par des effets spéciaux mais campé avec une intelligence raffinée et discrète par Vincent Simon. Le reste de la distribution est irréprochable.

Descendez donc aux Enfers au Théâtre 14, vous ne perdrez pas votre temps en perdant votre Eurydice.

 

Michèle Valmont

 

Théâtre 14 : 01 45 45 49 77