Articles avec le tag ‘effondrement’

La crise climatique, la crise des ressources et la démocratie, 2/2

7 janvier 2022,

Le citoyen au coeur de la résilience.

Résumé de l’épisode précédent:

Bien que tous les voyants climatiques soient au rouge, que les ressources s’épuisent, que les crises s’amplifient, tout se passe comme si nous essayions d’occulter, consciemment ou inconsciemment, que le monde s’enfonce peu à peu dans un état d’urgence permanent, dans lequel on sait que la démocratie sera bafouée.
Mais tout n’est pas perdu. Si l’on n’a pas toujours réussi à influer par le haut sur les nations ou le monde, il reste réaliste d’agir à l’échelle locale ou à l’échelle de territoires partageant des communs. De l’éco-hameau jusqu’aux bio-régions, en passant par le jardin partagé ou la salle associative, nous voyons que des groupes motivés arrivent à construire des enclaves écologiques et citoyennes, sur des principes de démocratie directe, capables de mieux résister à l’effondrement en cours. L’utopie voulant que ces enclaves s’interconnectent un jour afin de proposer des visions macro-territoriales.

(suite…)

L’effondrement a commencé. Il est politique

25 novembre 2019,

La rédaction du Sauvage pense que les effondrements ont commencé et, comme l’auteur de l’article, nous pouvons déjà déplorer le début de l’effondrement climatique (ainsi que celui de la biodiversité). Cet article paru dans le numéro 9 de la revue Terrestres en ligne dénonce avec précision l’effondrement politique en cours.

L’effondrement a commencé. Il est politique

Par Alain Bertho

« Il faut bien avoir à l’esprit que l’épuisement des possibilités de ce monde signifie tout autant celui de l’action politique qui allait de pair avec lui. »   Marcello Tari1

Ne pouvant maîtriser, même au prix d’une répression sanglante, l’immense soulèvement de son peuple, le gouvernement chilien annonce, le 30 octobre 2019, qu’il renonce à organiser la COP 25 originellement prévue du 2 au 13 décembre à Santiago. Quelques jours plus tôt une pétition avait été lancée en France pour son boycott, jugeant « cynique et caricatural d’organiser la COP 25 sous la menace des balles d’une armée qui s’est funestement illustrée sous la dictature d’Augusto Pinochet » et qualifiant de « faute » une façon « de faire ainsi un chèque en blanc à un gouvernement qui a décidé de réprimer avec la pire des brutalités celles et ceux qui veulent que le système change pour le bien commun ». Nous sommes bien aujourd’hui face à deux dangers mortels : la transformation de la terre en fournaise et la violence d’Etats défaillants et incapables d’y faire face.

Voilà qui nous révèle sans fards où nous en sommes vraiment. Le réchauffement climatique n’est pas une menace à venir. Il a déjà commencé. On en ressent les effets sur tous les continents où les peuples doivent faire face à des phénomènes extrêmes : (suite…)

Prédiction

9 juin 2019,

Par Ghislain Nicaise

Dans sa dernière chronique (le 7 juin) Dominique Seux déplorait sur France Inter que la ville de Paris renonce à la publicité de Total pour les jeux olympiques. Ce peut paraitre injuste : on peut comprendre qu’Anne Hidalgo n’ai pas eu envie de se faire huer ; peut-être que Total investit dans le renouvelable mais son enseigne est un étendard de la combustion de fossiles. Dominique Seux a, comme il l’assume, la tâche ingrate de défendre le productivisme néo-libéral, il ne le fait pas de manière agressive et il est sincère, très probablement. Cela ne l’empêche pas de ressortir un bobard (fake news en français) récurrent sur le prétendu échec des prédictions de l’équipe Meadows dans le rapport The limits to growth demandé par le Club de Rome. Les famines prévues ne seraient pas arrivées. Dominique Seux fait juste une erreur de date. Nous sommes en 2019 et l’effondrement de la population mondiale n’est pas prévu par le modèle World 3 avant 2030. C’est l’occasion de rappeler une fois de plus que le rapport Meadows a été réévalué 30 ans plus tard par un auteur indépendant, dans un autre laboratoire. Ce modèle qui fonctionnait de 1900 à 1970 date de sa mise en oeuvre, fonctionne assez correctement de 1970 à 2000, il a donc été prédictif, c’est ce qui est représenté (suite…)

La mutation du discours politique face à l’effondrement

7 juin 2019,

Les élections Européennes de 2019 ont illustré un fait historique dans l’histoire politique de l’Europe: la totalité des partis français ont inclus l’écologie dans leur programme. Certains propos sont même tout à fait radicaux, là où l’on ne s’y attendait pas. Je vous laisse deviner de quels partis viennent les discours suivants:

« Plus largement, derrière notre projet européen, il y a l’ambition d’une « civilisation écologique ». Cela signifie en finir avec le courtermisme et la loi du profit immédiat, sans égard pour l’ordre naturel, c’est-à-dire parfois le temps long. »
https://rassemblementnational.fr/videos/1er-mai-2019-a-metz-discours-de-marine-le-pen/

« La sécurité alimentaire, l’aménagement de notre territoire et la transition écologique, qui sont des conditions essentielles de notre avenir, passent d’abord par ce chemin. »
https://www.republicains.fr/actualites_tribune_pac_avenir_en_jeu_20190224

« Sensibiliser les citoyens, dès le plus jeune âge, à l’urgence écologique, grâce à un enseignement sur les enjeux du climat et de la biodiversité »
https://www.mouvementdemocrate.fr/programme/propositions-2436

« Engagés pour la transition écologique et la protection de l’environnement, développer une agriculture sans pesticides en 5 ans en aidant les agriculteurs »
https://www.les-patriotes.fr/nos-propositions-illustrees-lecologie/

« À l’heure où il faut faire un choix et agir pour une Europe plus écologique il faut savoir s’affranchir des seuls slogans, des seules postures, des seules bonnes intentions, et soutenir les orientations susceptibles de changer de cap pour passer de l’écologie de façade à l’écologie réelle. »
http://www.debout-la-france.fr/actualite/pour-passer-de-lecologie-de-facade-lecologie-reelle

N’en jetez plus ! Bien sûr, nous ne sommes pas dupes de l’incohérence entre ces paroles de posture électorale et la nature conservatrice de programmes ou de personnels politiques, qui, en réalité, prônent la continuation du modèle productiviste actuel, voire son renforcement.
Nous ne sommes pas surpris non plus par l’emploi fréquent de « transition écologique », un fourre-tout bien pratique dans l’esprit des conservateurs, car il peut parfaitement inclure la continuation du capitalisme par le biais de la croissance verte.

Mais la présence de ces mots nouveaux, et parfois forts – « civilisation écologique », « écologie réelle »- dans les partis de droite ou d’extrême-droite n’est pas seulement issue de la conjoncture électorale. (suite…)

Collapsologie

24 novembre 2017,

par Ghislain Nicaise

Sur l’excellent site The Conversation, on peut lire une mise au point de Jacques Igalens, professeur à l’Institut d’Administration des Entreprises de Toulouse, intitulé La collapsologie est-elle une science ?
Cet article est intéressant, bien que fidèle à la ligne éditoriale de The Conversation, qui essaye de ne pas prendre parti, sans jamais y parvenir complètement (peut-être parce que c’est tout simplement impossible). J’ai cependant relevé une bourde, à moins que ce ne soit une maladresse d’écriture, je cite :
il s’agit, avec le Club de Rome, de véritables prédictions sur la base de modèles dont les fondements se présentent comme scientifiques… Force est de constater que ces prédictions n’ont – heureusement – pas été vérifiées – encore que l’effondrement soit prévu pour 2030 –, donnant ainsi raison à tous ceux qui avaient, dès la parution du rapport, critiqué à la fois les hypothèses et la méthode de J.W. Forrester, la dynamique des systèmes.
Or les prédictions du rapport Meadows (commandé par le Club de Rome au début des années 1970) ont été réévaluées pour la période de 30 ans qui a suivi, avec de meilleurs ordinateurs et probablement de meilleures bases de données par l’australien Graham Turner. Contrairement à ce qu’écrit Jacques Igalens et que j’ai relevé sous la plume d’autres auteurs les prédictions ont jusqu’à présent été largement vérifiées (voir ici). Si le modèle qui était fonctionnel (rétroactivement) de 1900 à 1970, puis de manière prédictive pour le reste du XXe siècle continue à tenir la route, on doit donc effectivement s’attendre à l’effondrement de notre civilisation industrielle autour de 2030, avec la réserve d’une marge d’erreur (d’au moins cinq ans selon Dmitry Orlov) et surtout l’hypothèse que l’humanité continue à ne pas prendre les mesures qui s’imposent (en particulier renoncer à la croissance du PIB comme moteur de l’économie)1.

G.N.

(1) Le rapport Meadows prévoyait d’ailleurs plusieurs possibilités et plusieurs échéances selon les choix technologiques et politiques.

Note ajoutée le 3 décembre : Raphaël Stevens (le co-auteur du livre mis en illustration ci-dessus) m’a fait la faveur de réagir à cet article. Il m’a appris que G. Turner avait publié, seul, un travail assez simple d’actualisation des résultats du modèle World3 (celui du rapport Meadows) et qu’un modèle plus sophistiqué World6 aboutissait à la même conclusion : l’effondrement de la civilisation industrielle est un scenario très crédible. Il m’a permis aussi de nommer l’auteure du graphique de comparaison entre les prédictions de 1970 et leur vérification en 2000, il s’agit de Linda Eckstein, pour le compte du magazine en ligne du Smithsonian Institute.

Perspectives

25 août 2017,

Sur le site de Libération, en date du 23 août 2017, une tribune d’Yves Cochet, (ancien ministre de l’environnement, président de l’institut Momentum), intitulée :
De la fin d’un monde à la renaissance en 2050
Il y a trente-trois ans naissaient Les Verts, première organisation unifiée de l’écologie politique en France. Jusqu’à aujourd’hui, les représentants de ce parti, puis ceux de son successeur EE-LV, ont rempli presque tous les types de mandats aux fonctions électives des institutions républicaines. Pour rien, à peu de choses près. (suite…)

Revue du crieur n°5

21 octobre 2016,

revue-du-crieur-05-bandeauDeux articles qui ont attiré notre attention dans le numéro 5 de la Revue du Crieur

À la rencontre des «collapsologues»

Par Pablo Servigne

Au milieu du déni général ambiant quant à l’état du système Terre, un nombre croissant de personnes ordonnent déjà leur vie à l’horizon de la catastrophe ; parmi elles, une petite minorité extrêmement active – les «collapsologues» – consacre le plus clair de son temps à penser l’effondrement.

Pierre Rabhi, chantre d’une écologie inoffensive ?

Par Jade Lindgaard

Paysan ardéchois originaire du Sahel et pionnier de l’agroécologie, Pierre Rabhi est devenu en quelques décennies un «emblème» écolo-médiatique. Que s’est-il passé? Sa défense habile et obstinée d’une vie sobre et contemplative, son appel à vivre en harmonie avec l’écosystème et son opposition à la vacuité marchande l’ont promu au rang de penseur important et original de l’écologie française. Mais c’est surtout son habileté rhétorique et son insistance sur le rôle que chacun doit jouer, ici et maintenant, dans la transformation du monde par des gestes simples et quotidiens qui lui ont permis de devenir une sorte d’icône, auteur de best-sellers «engagés» et figure de la résistance au monde tel qu’il va. Pourtant, cet humanisme niant les conflits qui structurent nos sociétés et ignorant les inégalités existantes, et ce refus de s’agréger aux luttes en cours, dessinent un horizon profondément dépolitisé, au mieux naïf, au pire contre-productif.

A propos de Demain

4 août 2016,

demainpar Jean Monestier

Pas plus tard qu’hier, j’ai vu à Perpignan, au cinéma Le Castillet, le film « Demain », de Cyril Dion et Mélanie Laurent, que de nombreux militants m’avaient pressé de visionner. Ce que j’ai trouvé très positif, c’est que le public, alors que l’on approchait de la dernière séance, était encore important et comprenait de nombreux jeunes. La veille, j’étais allé entendre une conférence sur « La Méditerranée, une mer en sursis », où le public, nombreux également, n’était presque exclusivement formé que de personnes de plus de 45 ans. D’un côté, je me réjouis donc que ce film, qui tente de nous décrire un avenir possible après la catastrophe en cours, trouve une belle audience dépassant manifestement les cercles militants. Par ailleurs, mis à part le côté esthétique de certaines vues aériennes (suite…)

Faire société face à l’effondrement

15 juin 2016,

Le bon gouvernement LorenzettiLa fresque de Lorenzetti illustrant le bon gouvernement, palais municipal de Sienne

Nous avons lu sur le site de l’Institut Momentum le texte et la discussion de ce séminaire d’Yves Cochet :

Après l’effondrement, en l’absence d’un État, les humains se regrouperont-ils encore pour faire société, et comment contiendront-ils la violence interne à ce regroupement ? La grande majorité des humains vit dans un État, si l’on désigne ainsi la réunion d’un territoire et d’une population soumise à un pouvoir politique unique capable de fixer les règles du vivre-ensemble, de garantir seul la sécurité par les armes, et de lever impôts et taxes. Quelle que soit la diversité historique et géographique de cette institution, elle paraît triompher dans la seconde moitié du XXème siècle lorsque le nombre d’États passe d’une cinquantaine à près de deux cents pendant cette période. Paradoxalement, ce succès est souvent synonyme de l’effondrement d’États antérieurs qui se sont fracturés : URSS, Tchécoslovaquie, Yougoslavie, pour ne citer que trois exemples du continent européen. Cependant, le mot « effondrement » ne semble pas adapté à ces configurations-là puisque, assez rapidement, d’autres États sont nés de la partition des premiers. Il est donc nécessaire de préciser ce que nous entendons par « effondrement » (suite…)