Homme et galant homme

22 septembre 2013,

par Michèle Valmont

vz-28be9bca-3446-4bdb-af5a-8bc3ce0edebbEduardo de Filippo (1900-1984), auteur, acteur, homme politique napolitain, est relativement peu joué en France. Ainsi, la pièce « Homme et galant homme » (1922), à l’affiche du Théâtre 14, est donnée pour la première fois à Paris, dans une traduction de Huguette Hatem.

On retrouve ici le thème du théâtre dans le théâtre, cher à Pirandello, avec lequel de Filippo a par ailleurs travaillé.

Une troupe de comédiens misérables, dirigée par l’impérieux Gennaro, loge dans un hôtel des environs de Naples dans lequel ils cuisinent, font leur lessive…et répètent une pièce, histoire sordide d’une jeune fille engrossée par un homme à qui on demande réparation, qui rappelle étrangement la situation vécue par Alberto, le jeune impresario de la troupe, avec la mystérieuse Bice dont il est follement épris. Mais la jeune femme est mariée avec un comte et, pour sauver l’honneur de sa belle, l’amant « galant homme » est amené à simuler la folie devant le mari et la commissaire de police chargée de l’interner.

On est ici dans une farce joyeuse, évoquant irrésistiblement l’atmosphère du cinéma italien des années 30 à 50 où évoluaient, sous la direction de de Sica, Risi ou Rossellini, des comédiens comme Totò , Magnani ou Gassman, entourés de personnages hauts en couleurs, macérant dans une profonde misère masquée par une féroce joie de vivre et un sens de l’autodérision à toute épreuve.

Le charme de la pièce, qui comporte quelques longueurs, tient beaucoup aux rôles secondaires qui ponctuent l’action, parfois lourdaude, d’interventions savoureuses : on assiste ainsi à une répétition hilarante, menée tambour battant par le directeur de la troupe, Gennaro, truculent et omniprésent Jean-Jacques Blanc, interrompue par le souffleur, délicieux Jean-Marc Bihour, et rythmée par les râles de la vieille mère, hilarante  Yvette Poirier, qui excelle aussi dans le rôle de la commissaire de police.

Alberto, le galant amant, brillamment incarné par Thibaut Lacour, particulièrement convaincant dans ses fausses scènes de folie, Bice, Raphaëlle Lenglare, rayonnante jeune première et Pierre Gondard, mari trompé et trompeur plein d’autorité, constituent le noyau dramatique du vaudeville.

La mise en scène enlevée et rigoureuse de Patrick Pelloquet, intelligemment cadrée dans un décor tournant aux miroirs déformants dû à Sandrine Pelloquet, clarifie les rebondissements burlesques et situations extravagantes de cette moderne « commedia dell’arte » .

De la Porte de Vanves au pied du Vésuve, il n’y a qu’un pas : hâtez-vous de le franchir.

 

Michèle Valmont

 

Théâtre 14 : 01 45 45 49 77