par Pierre Lieutaghi
Reprint Le Sauvage 1er décembre 1990)
« Sauvage », terme riche de connotations multiples en nous et hors de nous. Il parle aussi bien de puissances natives, brutes, capables de jungles et de printemps, que de nos pulsions les plus destructrices.
Nous appartenons à une civilisation qui rêve sauvage mais qui tend à dégrader les forces fondamentales de la terre et de l’homme. La sauvagerie ne s’entend plus que comme mythe ou violence. A travers les médias et l’art, les miroirs que nous nous tendons ne retiennent plus que des images, des messages négatifs.
On voudrait offrir un miroir à la confiance, à la tendresse enracinée dans ce qu’il nous reste d’inatteignable, au cœur de notre territoire sauvage d’où tout peut renaître.
En dépit des entreprises de rétrécissement de l’être, cette sauvagerie essentielle propose toujours des refus, des ouvertures aux énergies re-créatrices.
Nous voulons nous interroger sur la modernité du sauvage, sur l’état, en nous et hors de nous, de cette force abrupte aux visages de baleine, de forêt, de cascade, de Rimbaud, de Picasso, de Bartok ou de Coltrane. On la croit toujours en attente de nouvelles demeures habitables. On la croit porteuse de vie non réductible.
Le moment vient d’une déclaration des états sauvages, sur laquelle fonder une expérience.
On vous convie à réfléchir sur ces amorces de propositions, à rassembler les échos que le mot de Sauvage éveille en vous, à nous accompagner dans la quête sans limite du territoire commun au tigre et à l’enfant.
Pierre Lieutaghi