Trois ingrédients sont nécessaires pour que la société de consommation puisse poursuivre sa ronde diabolique : la publicité, qui crée le désir de consommer, le crédit, qui en donne les moyens, et l’obsolescence programmée des produits, qui en renouvelle la nécessité. Ces trois ressorts de la société de croissance sont de véritables pousse-au-crime. Voici quelques repères pour vous permettre d’agir à bon escient contre l’agression publicitaire avec l’association R.A.P. (résistance à l’agression publicitaire).
Manifeste du RAP contre le système publicitaire
– OMNIPRÉSENTE ET MANIPULATRICE
Quelqu’un qui souhaite vivre en société ne peut pas échapper à la publicité. Chaque personne reçoit en moyenne entre 500 et 3000 messages publicitaires par jour. Entre 300 et 500 milliards de dollars US sont dépensés pour la publicité dans le monde, soit le deuxième budget mondial après la Défense. Mais il n’y en aura jamais assez pour elle ! Il y a en France un million de panneaux publicitaires et assimilés (dont probablement un tiers sont illégaux). Son matraquage est incessant et ses intrusions toujours plus sournoises : coupures TV et radio, téléphone, internet, bluetooth, tables de cafés creuses, autobus et métro emballés, sacs, vêtements, affichage sauvage, lumineux et déroulant, voire animé, bâches et écrans géants, même le corps humain…
De nombreuses disciplines scientifiques (psychologie, neurobiologie, sociologie…) et ressources créatives sont utilisées pour accroître la force de leur manipulation. En occupant d’énormes espaces à la télévision, partout dans le monde, la publicité est un vecteur de normalisation considérable de la pensée et des comportements : elle impose d’autant mieux ses modèles qu’elle pénètre l’intimité des familles. Mais non contente de s’introduire dans les foyers et de contrôler les enfants dès le plus jeune âge et à l’insu des parents, la publicité fait progressivement son entrée dans les écoles (matériel pédagogique, griffé, partenariats, ventes de boissons,…).
Avec le sponsorat, elle altère l’esprit du sport et s’immisce dangereusement dans la culture.
– DOGMATIQUE ET DANGEREUSE
La publicité propage des idéologies néfastes : sexisme, ethnocentrisme, culte de l’apparence, du “tout, tout de suite”, compétition, matérialisme, conformisme, violence, maigreur et jeunisme. Elle n’hésite pas à jouer sur nos pulsions animales, nos souffrances et nos frustrations pour nous vendre cette recette trompeuse qu’est le bonheur par la seule consommation.
La publicité génère la violence à la fois chez ceux qui ont les moyens d’écraser les autres de leur pouvoir d’achat, et chez ceux qui sont exclus de ce pouvoir, mais restent persuadés qu’acheter est l’unique clef du bonheur. Humiliés de ne pouvoir atteindre les “modèles de vie” que célèbrent les médias, ceux-ci vivent une frustration sans fin. La publicité pousse ainsi à la consommation dans un mépris total des réalités humaines, écologiques, et sociales.
– LIBERTICIDE
La publicité dans sa forme actuelle est totalitaire. L’envoi de messages se fait à sens unique sans réponse possible. Elle a le monopole de l’expression dans l’espace public qu’elle privatise de par son omniprésence. Elle s’impose aux yeux des passants qui n’ont pas droit à la liberté de [non] réception.
La publicité lie financièrement les médias de masse aux exigences des annonceurs-entreprises. Elle les pousse et les réduit à ne rechercher que le “chiffre” et l’audimat au détriment de la qualité et de l’esprit critique.
La publicité crée aussi un danger pour l’information : avec la menace de retirer les budgets dont les médias dépendent, les pouvoirs économiques deviennent intouchables, compromettant l’indépendance des médias.
Les outils techniques de communications numériques – internet, écrans publicitaires, téléphone mobile – sont les yeux et les oreilles du système publicitaire. Après des décennies d’agression visuelle, la publicité se nourrit désormais de nos données personnelles pour accroitre son talent manipulatoire. Organisé par quelques grandes multinationales, ce fichage généralisé et centralisé de la population mondiale, contre lequel il est bien difficile de se prémunir, échappe la plupart du temps aux réglementations nationales. Jamais dans l’histoire de l’humanité il n’y a eu de système de fichage aussi bien renseigné : bien d’avantage que les États totalitaires.
– INÉGALITAIRE
Avec le système publicitaire actuel, seuls ceux qui ont de l’argent peuvent communiquer massivement de façon pérenne. Une grosse entreprise peut facilement se doter d’une image positive et vendeuse même si elle a des mauvais produits à vendre et un comportement irresponsable. Au contraire, un petit producteur aux procédés éthiques se retrouve noyé, faute de moyens…
La publicité est le carburant de l’économie libérale et industrielle, exploite sans vergogne les ressources des pays pauvres en prétendant les aider, renforce les inégalités et réserve la richesse à ceux qui en ont déjà trop.
La publicité est massivement au service d’une poignée d’entreprises multinationales hégémonique qui s’en servent pour étouffer toute concurrence. En 2011, en France, 550 annonceurs effectuent à elles seules 80 % des investissements publicitaires dans les médias nationaux. Rapporté aux 3 millions d’entreprises françaises, cela donne donc moins de 2 entreprises sur 10 000 ayant la capacité d’être largement visible du grand public.
Elle construit un système de prétendue compétition où ce n’est pas vraiment le meilleur qui gagne mais le plus riche. A coups de millions, les groupes de pressions ou lobbies font leur propagande quels que soient les risques sur l’environnement et les répercussions sur la santé physique et mentale (nucléaire, automobile, alcool, tabac …).
– INUTILE ET COUTEUSE
La publicité et ses services ne sont jamais gratuits que ce soit dans l’espace public (mobilier urbain), dans les médias ou ailleurs.
En tant que consommateurs, nous payons son coût en achetant des produits vantés par la publicité, puisque le coût de celle-ci est inclus dans le prix de la vente. Les annonceurs ont dépensé 31,4 milliards d’euros en 2011 en France (soit 480€ par habitant).
La publicité crée de faux besoins et provoque des dépenses inutiles et le sur-endettement. Le mythe du bonheur, la frustration et la déception continuelle de la consommation suscités par la publicité sont un cercle de dépendance sans fin.
En poussant à une consommation superflue et futile, la publicité contribue à l’épuisement des ressources et à la création de déchets aussi polluants que coûteux, et dont nous payons le retraitement en tant que contribuables ainsi que les conséquences sanitaires (obésité, anorexie, surcharge cognitive,…), sociales et environnementales à long terme en tant que citoyen. Ainsi, par exemple, en va-t-il des 31 kilos de prospectus par an et par boîte aux lettres qui vont généralement directement dans nos poubelles…
SORTIR DU SYSTÈME PUBLICITAIRE
La publicité ne s’adresse qu’aux consommateurs au détriment des citoyens éveillés et responsables. A la publicité nous préférons la culture, le paysage et les arts (qui embelliront nos villes et nous divertiront sans arrière-pensée commerciale), la philosophie, la poésie, l’humour et la littérature, les associations, la politique locale et les initiatives sociales, l’expression libre, individuelle et gratuite.
La seule publicité acceptable est celle que l’on consulte librement, en conscience. Elle doit revenir à un rôle neutre, non agressif et purement informatif ; elle doit être contenue, localisée, égalitaire d’accès et non imposée. Les annuaires sont un bon exemple de publicité égalitaire et non agressive.
Les caractéristiques et les conditions de fabrication des produits des annonceurs des publicités sont souvent analysées par les associations de consommateurs ou de défense des droits humains, sociaux et environnementaux. Ces associations exercent une analyse critique indépendante et font un travail d’investigation pour donner des informations dissimulées par la publicité.
Des modèles économiques sans publicité existent pourtant, que ce soit dans les médias, avec quelques journaux comme le Canard enchainé ou bien des sites internet comme Wikipédia, que ce soit dans les villes, l’exemple de São Paulo fait date, ou bien dans le métro, Stockholm est une belle illustration.
Il existe aussi des systèmes économiques viables et frugaux où la demande qui se concerte directement et va vers l’offre. Ainsi, les Associations de Maintien de l’Agriculture Paysanne où les consommateurs et les producteurs communiquent et échangent directement.
RÉSISTONS !!
Loin de négliger, aussi limités soient-ils, les moyens individuels de résistance à la publicité (autocollant “StopPub” sur les boites aux lettres, inscription sur des listes anti-prospection, bloqueur de publicité sur internet…), il faut savoir que des résistances collectives s’organisent déjà ! Actions ludiques, créatives et non-violentes, actions juridiques, interpellation des élus, réflexions et sensibilisation des médias et du public…
Toute participation est la bienvenue, quelle que soit sa forme (morale, active, financière). A chacun son rythme, à chacun son possible.
NOS REVENDICATIONS
Reconnaissance de la liberté de [non] réception comme corollaire de la liberté d’expression ;
Création d’une autorité réellement indépendante de contrôle de la publicité cogérée par des associations concernées, des professionnels du secteur et une instance publique ;
Dans l’espace public : Pas d’affiches dépassant 50cmx70 cm, avec un dispositif limité de 2 m2 par panneau et avec un nombre de panneaux limité en fonction du nombre d’habitants ; Interdiction des panneaux éclairés, déroulants et animés, énergivores et intrusifs ;
Milieu scolaire : Interdiction de la publicité dans les manuels scolaires, les kits pédagogiques et partenariats, pas de marques sur les vêtements des élèves et des professeurs de la tête au pied et sur le matériel scolaire, interdiction des publicités à moins de 100m des écoles ;
Dans le service public : Pas de publicité ou de dépendance financière à la publicité ;
Sur internet : Blocage par défaut des cookies à finalité publicitaire, intégration par défaut de dispositifs de blocage de récupération des données personnelles et de publicité dans l’ensemble des navigateurs internet et appliquer la loi condamnant les pourriels (spams) ;
Dans les Boites aux lettres : Respect des autocollants « Stop Pub » sur les boîtes aux lettres et fortes amendes en cas de non respect, application du principe pollueur-payeur pour que les commanditaires de ces pubs en payent le retraitement à 100% ;
Dans les médias : limiter les apports de la publicité aux médias privés à moins de 50% du financement est nécessaire pour garantir une liberté éditoriale, et interdire toute publicité dans les médias publics.
Adhésion à RÉSISTANCE À L’AGRESSION PUBLICITAIRE
24, rue de la Chine 75020 Paris
contact@antipub.org
Tèl : 01 43 66 02 04 – Tcp : 01 43 66 03 10
source : http://antipub.org/spip.php?article287
Appel à la constitution de groupes locaux de R.A.P.
Le système publicitaire est dans tous les espaces. La mobilisation doit être organisée, vigilante et forte partout. Ce n’est qu’en luttant et en articulant la lutte contre ce système qu’on arrivera à l’emporter. C’est pour ça que l’association R.A.P. encourage les personnes motivées par cette cause à former des groupes R.A.P. dans leur localité.
Créer un groupe permet de sensibiliser et de mobiliser sur des thèmes tels que la pub sur internet et dans les médias, la pub autour et dans les écoles (via les manuels pédagogiques), la pub dans les boites aux lettres, l’idéologie publicitaire, l’affichage, … Un groupe local pourra participer à des campagnes nationales et mener des actions locales comme, par exemple, la mise en place d’un règlement local de la publicité dans une ville.
L’association R.A.P. lance un appel à former des groupes locaux « antipub » et R.A.P. dans toute les régions.
Résistance à l’agression publicitaire (R.A.P.)
Adresse : 24, rue de la Chine – 75020 Paris
Contact (groupes locaux) : khaled.gaiji@antipub.org