par Gabriel Peynichou
Évangile selon Saint Matthieu, II, 13-15
Quand ils se furent retirés, voilà qu’un ange du Seigneur apparut en songe à Joseph et dit : Lève-toi, prends l’enfant et sa mère, fuis en Égypte et restes-y jusqu’à ce que je te parle. Car Hérode va chercher l’enfant pour le perdre. Et lui se leva, prit de nuit l’enfant et sa mère et se retira en Égypte, et il y fut jusqu’à la mort d’Hérode, pour remplir cette parole du Seigneur qui dit via le prophète : J’ai rappelé d’Égypte mon fils.
Pour les musulmans, la fuite en Égypte est autrement plus dramatique. Selon le Coran, Marie n’aurait pas accouché dans une étable à Bethléem, aidée par un âne, Joseph et un bœuf, mais seule, appuyée contre le tronc d’un palmier, plus précisément d’un palmier dattier : Phoenix dactylifera.
Coran, Sourate 19 dite de Marie (Maryam)
Au nom de Dieu, le Clément, le Miséricordieux. ”Comment, s’étonna-t-elle, pourrais-je avoir un enfant alors qu’aucun être humain ne m’a jamais touchée et que je n’ai jamais été une femme de mœurs légères ? ” Il lui fut répondu : Ainsi en a décidé ton Seigneur qui a dit : “Rien n’est plus facile pour Moi. Nous ferons de cet enfant un signe pour les hommes et une miséricorde émanant de Nous.” Et il en fut ainsi. Elle devint donc enceinte de l’enfant et se retira avec lui en un lieu éloigné. Puis, saisie par les douleurs de l’accouchement, elle s’adossa au tronc d’un palmier en s’écriant : ”Plût à Dieu que je fusse morte et oubliée bien avant cet instant ! Une voix l’appela alors de dessous d’elle : ”Ne t’afflige point ! Ton Seigneur a fait jaillir un ruisseau à tes pieds. Secoue vers toi le tronc du palmier, il en tombera sur toi des dattes mûres et succulentes”.
La précocité du Christ est encore une fois exprimée ici. En revanche l’idée qu’une divinité féminine et maternelle puisse être associée au dattier remonte à la plus haute antiquité. Sur une hydrie attique, sorte de vase fermé muni de trois anses du peintre de Kléophradès, on retrouve un palmier se penchant sur la chevelure d’une femme assise en lamentation, devant la ville détruite de Troie.
Alain Hervé, auteur d’un livre intitulé « Le palmier », publié chez Actes sud, parle en ce qui concerne les rapports entre les hommes et le palmier dattier de «coévolution». Homme et dattier ont toujours été des alliés, plus particulièrement dans des milieux hostiles comme le désert. Alain Hervé pose la question de savoir si l’homme a transporté les palmiers sur tous les continents de la planète pour des raisons économiques ou de mise en valeur des paysages, ou si c’est le palmier dont l’existence est bien antérieure à la nôtre, qui aurait utilisé l’homme pour se déplacer. Je ne pense pas que l’ethnobotanique puisse pour l’instant répondre à cette question. En revanche le dattier sans les systèmes d’irrigation et de fécondation mis au point par l’homme n’existerait plus et on imagine mal la survie des populations des oasis d’Égypte, du Moyen Orient et d’autres régions désertiques sans cette plante. Voici la description que nous en donne Alain Hervé : ‘ « Le palmier est un extravagant qui nous arrive tout ébouriffé du fond de la préhistoire. S’il appartient pour les botanistes à la famille des herbes, il se dote pourtant de tous les attributs de l’arbre. Sa beauté est solaire, la courbe de sa palme entraîne à la rêverie. Glorifié par les Romains, il fut l’emblème de César. Rapporté en Occident, au XVIIe siècle, dans les bagages des navigateurs, il devint très recherché pour ses richesses multiples : huile, cire, sucre, alcool, fécule, dattes, fibres diverses et rotin. »
Il ne manque à cette énumération que l’aspect religieux :
Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean – Chapitre XII 12-15 12
Le lendemain, la grande foule venue pour la fête apprit que Jésus arrivait à Jérusalem. 13 Les gens prirent des branches de palmiers et sortirent à sa rencontre. Ils criaient : « Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Béni soit le roi d’Israël ! »
14 Jésus, trouvant un petit âne, s’assit dessus, comme il est écrit : 15 Ne crains pas, fille de Sion. Voici ton roi qui vient, assis sur le petit d’une ânesse.
Makrout.
Imaginer une recette avec des dattes me semble un peu présomptueux. Ce fruit se suffit à lui-même. En cherchant bien pourtant les Makrouts pourraient convenir, ils font partie de ces pâtisseries qui ont traversé le temps et l’espace, de la Galilée du premier siècle de notre ère jusqu’à nous. Pour les confectionner, il faut de la semoule que l’on étale sur une planche à pâtisserie, à laquelle on ajoute du beurre mou et un peu d’eau tiède. On doit obtenir en pétrissant une pâte épaisse. Avec ce mélange semoule beurre eau, auquel on peut ajouter des épices, on fait une couche d’1 cm ½ d’épaisseur de forme rectangulaire que l’on étale sur du papier sulfurisé. Puis on recouvre la pâte avec des dattes dénoyautées et hachées. On roule ce rectangle sur lui-même, on découpe des tranches de 4 à 5 cm que l’on passe quelques minutes dans une friteuse et quand les Makrouts ont refroidi, on verse du miel chaud et liquide et on laisse reposer.