par Alain Hervé
A la veille des sénatoriales, je crains de devoir reconnaître dans le positionnement des candidats le complexe originel de ceux qui ont entraîné l’écologie en politique dès les années 70. Le Sauvage en fut un exemple en allant se nicher à gauche chez le Nouvel Observateur.
C’était déjà la crainte d’apparaître comme réactionnaires pour ne pas commencer leur analyse par l’aspect social de la situation.
L’écologie pour être reconnue comme de gauche devait se prétendre d’abord sociale et seulement ensuite écologique.
Pesanteur historique et conformisme intellectuel, pour ne pas dire puérilité.
On peut comprendre la douloureuse constatation de l’indifférence de la nature aux conquêtes sociales.
La nature n’est ni compatissante, ni juge des aménagements entre classes sociales. La nature n’a pas lu Marx.
Elle apprécie seulement les irruptions des actions humaines dans le fonctionnement de ses mécanismes fondamentaux. La nature a enregistré les conséquences des découvertes de Louis Pasteur avec la diminution de la mortalité infantile. Désormais par leur nombre les hommes occupent trop d’espace. Et ils s’arrogent trop de libertés dans le développement de leurs technologies. Ils rejettent trop de dioxyde de carbone dans l’atmosphère.
L’écologie ne peut pas, ne doit pas prendre en compte les retombées sociales. C’est à la société d’aménager son fonctionnement en tenant compte des contraintes de la nature.
On ne peut pas ignorer les déséquilibres climatiques pour établir des perspectives économiques. Pas plus que l’on a ignoré les contraintes de la pesanteur jusqu’à ce jour.
On ne négocie pas avec la nature. C’est elle qui dicte son calendrier. On ne transige pas des délais avec le réchauffement climatique.
Ce n’est pas un ordre social qui est en jeu. C’est la disparition de l’espèce.
Je sais que ce discours est encore insupportable pour beaucoup de ceux qui campent dans la croyance de la supériorité absolue de l’homme. Il signifie un renversement des valeurs que tous les monothéismes et les philosophies ont prônées depuis l’émergence de la conscience, du langage, de la rationalité.
Cela ne signifie pas que l’on doive renoncer à tout progrès social. Cela signifie qu’il ne peut se développer qu’en respectant les équilibres naturels.
Cela semble simple. En fait, au vu des convictions et des entreprises de tous nos leaders nous n’en prenons pas le chemin, ni en France, ni dans le monde.
La nature à partir de maintenant écrit notre histoire. Elle se termine vite et mal pour le mammifère humain.
Tandis que la sonde Cassini commence de nous raconter les planètes de notre minuscule système solaire, on peut se demander ce que pèse l’humanité dans l’univers. Ces temps ci, l’astronomie nous épate.
Je conclus par une citation extraite du Moby Dick de Herman Melville que je viens de relire : « Quand l’homme prend l’univers entier comme une vaste blague, certains moments de cette affaire étrange et bigarrée que nous appelons la vie lui apparaissent terriblement cocasses et bien qu’il n’aperçoive que vaguement l’esprit de cette blague, et bien qu’il se doute qu’elle se fait à ses propres dépens, rien ne le décourage, rien ne lui semble valoir la peine d’une discussion, il encaisse… » chapitre XLIX