par Ghislain Nicaise
Depuis la mort tragique de Bernard Maris, je n’attendais plus rien de cette profession mais une rencontre avec un perma-économiste m’a fait reprendre espoir. C’est une aventure culturelle et non culturale que je raconte aujourd’hui mais elle n’en est pas moins permacole. J’avais retenu quelque part que des économistes avaient essayé d’évaluer la richesse procurée par la biodiversité mais c’est autre chose que d’en rencontrer un. J’entends des grincheux me rappeler que la biodiversité est inestimable mais la réponse est simple : il faut des chiffres qui en jettent, des montagnes d’euros, pour ébranler sinon convaincre les malcomprenants acharnés de la croissance, qui sont au pouvoir. Cet économiste sympathique et extrêmement utile est professeur, directeur de l’institut INSPIRE, basé à Marseille (1). Il se nomme Emmanuel Delannoy, il est l’auteur de livres clairs (accessibles aux profanes) et bien écrits. J’ai pu lire à la suite de sa conférence “L’économie expliquée aux humains” et “La permaéconomie”, je peux vous recommander les deux. Dans l’économie expliquée aux humains (paru en 2011), l’acteur de fiction qui nous explique l’économie est le grand longicorne, Cerambyx cerdo (2). La conférence à laquelle j’ai assisté portait sur le lancement d’un autre ouvrage, la permaéconomie, dont est tirée la première figure (DR). Emmanuel Delannoy a démoli sobrement le graphe classique du développement durable (ci-dessous), qui montre l’environnement comme une des sphères d’intérêt, à part égale avec le social d’une part et l’économie de l’autre. Notre social et notre économie sont bien inclus à l’intérieur de la biosphère et sans elle l’humanité n’existe pas. Ma paresse et l’envie que vous ayez d’autres choses à découvrir dans ce livre m’incitent à m’arrêter ici.
G.N.
(1) Je renvoie à leur site, il est bien plus riche que l’extrait qui suit : L’Institut INSPIRE (Initiative pour la Promotion d’une Industrie Réconciliée avec l’Ecologie et la société) est … un centre de réflexion, de mutualisation des connaissances et d’actions au service de la réconciliation de l’économie et de la biosphère.
Ses actions ont pour objectifs :
• de promouvoir la préservation et la restauration de la dynamique et de la fonctionnalité des écosystèmes,
• de favoriser la création d’emplois porteurs de sens et créateurs de lien social,
• d’inciter les entreprises à reconsidérer leurs modèles économiques et de production pour prendre en compte leurs interactions avec la biosphère,
• d’inciter les collectivités à prendre en compte la pérennité du capital naturel dans les politiques d’aménagement du territoire ou de développement économique.
Dans un contexte de changements globaux, notamment celui de l’inversion des raretés, l’Institut INSPIRE se propose de faciliter la transition vers un modèle de développement économique créateur d’emplois, capable de créer plus de richesses et de bien-être tout en consommant moins de ressources naturelles.
Les principes fondateurs de cette réflexion sont :
• un accroissement radical de la productivité des ressources naturelles,
• une économie circulaire inspirée par la nature,
• une économie privilégiant l’usage, le service et la fonctionnalité,
• le réinvestissement dans le capital naturel pour restaurer la pleine fonctionnalité et le potentiel d’évolution des écosystèmes.
Au service de ces objectifs, l’action de l’Institut INSPIRE vise à rassembler et diffuser les connaissances utiles, à tisser des réseaux de partenariats pluridisciplinaires, à sensibiliser les décideurs et à accompagner les acteurs du changement, ainsi qu’à accroître la somme de connaissances utiles par une contribution à la recherche, à l’expérimentation et au retour d’expérience.
Les activités de l’Institut INSPIRE s’articulent comme suit :
• veille internationale, détection et diffusion des meilleures technologies disponibles et des meilleures pratiques via l’organisation de conférences, colloques et séminaires,
• initiation et coordination de projets de recherche en partenariat,
• sensibilisation et formation des décideurs, des personnels d’entreprises, et des futurs ingénieurs et managers,
• accompagnement du changement et mise en œuvre de projets pilotes, dans le cadre d’actions individuelles ou collectives,
• retour d’expérience, mise en commun et capitalisation des savoirs acquis.
(2) L’actuel effondrement des populations d’insectes, rappelé récemment par la grande presse, est un drame en soi mais il est aussi annonciateur d’autres effondrements de l’écosystème qui nous abrite, et le choix du longicorne est tout à fait pertinent. Nos hôtels à insectes et nos ruches Warré ne pèsent pas lourd face à l’agrochimie dominante.