Archives d’un auteur

Mais quand vont-ils parler d’écologie ?

11 janvier 2011,

Aveuglés par les projecteurs, assourdis par la sono. Nous sommes les spectateurs du cirque médiaticopolitique où l’on distingue difficilement ceux qui jouent à droite et ceux qui jouent à gauche. Ce qui importe c’est de monter sur la scène télévisuelle et d’intéresser, de captiver ou de terroriser le public.
Les meilleurs acteurs ou acrobates sont manifestement Mélanchon et Besancenot, le père Le Pen nous manque. Sa fille n’a pas encore sa tchatche. Mais ça vient.
Elle vient de prodigieusement réussir son dernier numéro. On la siffle. Elle suscite une universelle réprobation. Ce qui lui vaut des milliers de citations. On n’entend plus qu’elle. Bravo l’artiste.
Elle se spécialise dans le non dit des autres candidats. Elle seule ose parler d’immigration et d’identité nationale. Elle fait un tabac. Attention, demain elle va se mettre à parler d’écologie…
Ségolène Royal perd la main, ne sait plus esbroufer le client, affoler la statistique et exploser le pourcentage.
DSK en financier international qui va gérer la misère sociale comme il prétend sauver la croissance est un peu pompeux pour ne pas dire sinistre. Il tente d’impressionner le client par son sang-froid qui commence à sentir le réchauffé. (voir la citation de Kenneth Boulding)
Du côté des écologistes on manque de spectacle. Ca se traîne. Joly nous fait dans le social tiède. Hulot dans le pas de deux. Cohn Bendit dans la fiancée perdue.
On l’avait bien dit jadis, l’écologie n’est ni de droite ni de gauche, elle est aujourd’hui médiatique comme les autres.
Nous sommes bien dans la société du spectacle.
Alain HERVE

Cher prince Charles de Windsor

11 janvier 2011,

J’ai beaucoup apprécié votre entretien avec l’hélicoécologiste Yann Arthus-Bertrand sur FR3 dans l’émission « Vu du ciel »le 5 janvier dernier*. La rapide visite de votre domaine de sept cents hectares de Highgrove est convaincante. Vous êtes un véritable écologiste en profondeur. On souhaiterait entendre dans la bouche de quelques uns de nos responsables politiques, y compris écologistes, vos propos sur la forêt primaire, la biodiversité, l’agriculture biologique, l’extinction des espèces, le changement climatique, la responsabilité de l’humanité ou la récupération des eaux usées des salles de bain pour arroser les platebandes de fleurs au pied du manoir.
Votre position éminente dans la hiérarchie sociale de l’espèce humaine vous offre une tribune exceptionnelle pour faire connaître ce qu’est vraiment l’écologie au grand public.
Elle vous dessert également car on peut critiquer cette situation anachronique, et les revenus colossaux dont vous bénéficiez. Même si l’on sait que vous avez demandé à payer des impôts, ou que vous entretenez des fondations diverses.
Votre déambulation dans le parc de votre propriété nous fait découvrir à la fois vos topiaires tarabiscotées et votre souci d’élever et de soigner votre bétail avec le moins de chimie possible. Bravo, mais pourquoi tous ces mammifères brouteurs dont vous devez connaître le désastreux bilan écologique? Pourquoi ne pas promouvoir auprès des consommateurs humains des diètes davantage végétariennes ?
Vous vous souciez de la disparition des forêts primaires. Bien. Mais vous savez que sur toute la planète on finit de les faire disparaître pour créer de la prairie et élever du bétail pour fabrique du steack.
Nous avons suivi avec intérêt votre critique violente de l’aménagement urbain contemporain et de l’architecture dite moderne. Vous êtes un sympathique provocateur, un réagisseur tonique. Lorsqu’on voit Oscar Niemeyer s’entêter à cent trois ans à continuer de construire ses monstres de béton démodés, on est tenté d’examiner votre position de plus près.
On se souvient que vous avez longuement fréquenté Laurens Van der Post, l’écrivain philosophe sud-africain qui a inspiré votre attitude devant la vie et pour assumer le rôle très difficile que vous devez jouer. Nous ne saurions trop recommander aux lecteurs du Sauvage de faire sa connaissance.
Nous vous assurons de notre sympathie
Alain HERVE

Cher Dany Cohn-Bendit

25 décembre 2010,

Texte envoyé à Dany Cohn-Bendit à propos d’une tribune intitulée “Les écolos et 2012”, envoyée aux coopérateurs d’Europe Ecologie-les Verts.
Joyeux Noël

Il me semble qu’à propos de cette candidature 2012:
1: Les écologistes doivent avoir un candidat.
2: Pour continuer de faire connaître l’urgence des problèmes écologiques.
Un éventuel candidat tel Eva Joly qui s’applique à ne pas parler d’écologie, n’est pas le candidat approprié. Il y en a d’autres, peut-être moins médiatiques mais qui connaissent leur sujet.
3: Il ne faut pas compter sur les socialistes pour en parler. DSK s’il était candidat est un financier international qui ne croit qu’à la croissance et à la mondialisation.
4: Servir d’appoint aux socialistes pour leur permettre d’être élus est un leurre. Car ils feront la même politique économique que la droite. Et seront aussi sourds à propos d’écologie qu’ont pu l’être Mitterrand; Jospin et Rocard.
5: Si Marine Le Pen a l’intelligence de parler d’écologie, elle fera un malheur, car l’écologie progresse en profondeur parmi tous les non dits de notre société.

Alain HERVE

La Vie brève

14 novembre 2010,

Daniel Maja est un roi. Un roi de la fable, un roi de La Fontaine. C’est notre La Fontaine.

D’un trait il évoque toute notre vie. Notre perplexité quotidienne devant le monde où nous vivons.
Voilà la Vie brève.

Comme si nous ne vivions pas au dessus du volcan.
Comme si nous étions des enfants effarés de ce qui se passe derrière la porte.
Il nous décharge du poids d’exister. Il anéantit les sérieux. Il exalte la seule sécrétion cérébrale qui mérite d’être retenue : l’imagination. Il nous souffle des pétards dans la comprenette. Daniel nous guide dans le noir depuis les débuts du Sauvage en 1972.
C’est grave : Daniel n’est pas le dessinateur le plus célèbre de son temps.
On se demande bien pourquoi?

Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu

19 octobre 2010,

Mon cher Woody

Nous nous sommes régalés pendant une heure trente huit de ton « Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu »

On se laisse enchanter par ton choix des musiques de Boccherini et de Mozart, par tes décors bourgeois sans complexe, par tes réparties vaudevillesques, par tes acteurs réglés au millimètre pour exprimer tes intentions, par ton désabusement discret, par ta capacité de nous inviter à jouir des instants de la vie, bref par ton savoir-faire, ton savoir-vivre, ton savoir-jouir.(Tu me permettras de te tutoyer depuis quarante quatre ans que je fréquente.)

Les gâte-sauces de la critique font la fine bouche. Ce qui laisse supposer qu’ils ne se sont pas abandonnés à ton ton, à ta désinvolture.

Oui bien sur tu n’évoques pas la faim dans le monde, les mines de charbon en Chine, la corruption à Moscou et la pollution de l’air des appartements par la colle de la moquette.(réf.WA)

Tu n’es pas un grand inquisiteur du politiquement correct. Nous en sommes ravis. On suit ta démarche shakespearienne en mode mineur (rappelée dans le film). Comme l’écrit très justement Laurent Samuel sur son site (voir nos liens) et pour reprendre une subtile locution suisse romande : « tu nous déçois en bien ».

Depuis le temps que nous sommes contemporains on ne se lasse passe de ta compagnie. On suit avec bonheur ta psychanalyse publique. On se félicite que tu aies trouvé avec la mise en scène de cinéma un remède à ta difficulté d’être. Nous en tirons de grands bonheurs chaque année.

Ta mort signifiera la nôtre en tout cas pour ce qui me concerne. Ne te presse pas.

Alain HERVE

C’est une femme, une juste, une justicière…

6 octobre 2010,

C’est une femme, une juste, une justicière, une sympathique, une immigrée, une pittoresque figure du panthéon médiatique …
Autant de qualités qui la désignent pour parler de n’importe quoi et même d’écologie.
Que le choix de cette personnalité pour concourir à la candidature à la présidence de la république soit diplomatique, c’est évident.
Elle ménage les susceptibilités éventuelles entre Europe Ecologie et les Verts, dont elle semble être distanciée.
On dit qu’elle étudie d’urgence l’écologie. Et qu’elle est douée. Soit. Mais ce n’est pas suffisant.
L’Ecologie est une nouvelle discipline politique qui peine à se faire entendre. Son argumentation est fragile et radicale tout à la fois. Elle annonce un renversement total de tous les postulats sur lesquels repose aujourd’hui le fonctionnement de la société humaine.
C’est non à la consommation-gaspillage, non à la vitesse, non au centralisme, non à la prédation des ressources fossiles restantes, non aux risques nucléaires civils et militaires, non au saccage de la biodiversité, non à la recherche scientifique stipendiée, non à la spéculation financière…
En revanche oui à la sobriété partagée, oui à la lenteur, au temps vécu, oui aux relations humaines, oui au recyclage des ressources, oui aux énergies douces, oui au respect de toutes les formes de vie, animales et végétales, oui aux recherches scientifiques libres, oui au micro crédit, oui aux retrouvailles avec le bonheur d’être vivant…

Depuis les éclats de René Dumont en 1974, il y a trente six ans, on n’a pas beaucoup avancé. Seuls les marchands de peinture verte ont gagné. Il est touchant de voir les politiques de droite, du centre et de gauche se maquiller en vert.
L’écologie politique est aujourd’hui menacée par l’opportunisme politique. C’est à dire qu’il s’agit souvent d’accéder à un poste d’élu rémunéré. Ensuite elle est menacée par cette lèpre de la pensée : le politiquement correct, la nouvelle bien pensance démagogique.
Je crois pour ma part que le candidat à la candidature qui connaît le mieux son sujet et qui l’exprime le mieux est pour le moment Yves Cochet.
L’analyse écologique fait l’essentiel de son discours et conditionne ses prises de position sur les autres problèmes que la société humaine doit affronter tels l’emploi, la santé, l’immigration, l’urbanisation, les transports, la production agricole…
L’écologie n’est pas accessoire, elle est première.
On peut ensuite discuter de la qualité médiatique du candidat à la candidature, de son charisme télévisuel, de sa séduction pipeulesque, de ses vêtements, de la couleur des ses lunettes, mais ce sont des préoccupations accessoires.

Un prétendant écologique doit d’abord parler d’écologie.

Alain HERVE

Book of palms

17 septembre 2010,

Carl Friedich Philipp von Martius
Taschen éditeur

L’œuvre d’une vie publiée en trois volumes in folio entre 1823 et 1853 vient de reparaître.
Rassurez vous, malgré le titre en anglais, il est également traduit en français. Ce livre mythique ne subsistait qu’à quelques exemplaires valant des centaines de milliers d’euros. Il ne coûte plus que 99,99 euros. Et pour le prix vous aurez cinq kilos de papier relié. Et de prodigieux cadeaux de Noël à portée de la main, sinon du portefeuille.
Les trois volumes ont été ramassés en un seul d’un format un peu inférieur à l’in folio soit 43/31 centimètres. Mais l’objet reste une merveille. La qualité de l’impression est superbe et sur 442 pages on retrouve aussi bien des détails que des vues d’ensemble des palmiers.

Von Martius en Amazonie
Ainsi nous pouvons saluer  von Martius dont nous connaissons la devise : In palmis semper parens juventus, in palmis resurgo (Parmi les palmiers je me sens toujours jeune, parmi les palmiers je ressuscite).
Résurrection en effet, mise en scène avec virtuosité par H. Walter Lack, directeur du jardin botanique et du musée botanique de Berlin. On peut dire que Martius fut l’inventeur des palmiers pour les Européens, qui les ignoraient. En 1753 Linné en avait répertorié neuf espèces seulement et n’en avait vu que quatre ! Seuls Humboldt et Bonpland avaient entamé l’ouvrage d’investigation au cours de leur voyage en Amérique du Sud de 1799 à 1804. Ils en avaient répertorié une centaine.

Certes nous sommes encore très loin des connaissances contemporaines répertoriées dans le Genera Palmarum de Uhl et Dransfield .

Mais ce qui est très émouvant c’est d’assister à la naissance d’une passion exclusive en même temps que d’une science botanique.

La prodigieuse attention portée aux détails de la plante dans les dessins de Martius nous ouvre les yeux sur les mystères du cœur contourné des palmiers, sur la beauté des fleurs, sur la sensualité des fruits, sur la sexualité des gousses de graines. Le monde végétal apparaît comme un immense répertoire de formes vivantes. On plaint ceux qui ne voient que du vert dans la nature. Avec les palmiers observés dans la forêt primaire, on pénètre dans l’imaginaire devenu la profusion du réel.
La nature rêve, et raconte ses rêves dans le cœur des palmiers.
Même si les noms latins d’identification des plantes ont évolué, on trouve déjà l’Oenocarpus , les Phoenix, les Syagrus, les Chamaerops, les Trachycarpus, les Borassus, les Calamus…
Une vie entière consacrée aux palmiers au retour d’un périple de 2.250 kilomètres pendant trois ans, de 1817 à 1820 à travers le Pérou et le Brésil, se trouve résumée dans ce volume.
Et il ne faut pas oublier que Martius rapportait une collection de cent cinquante mille objets et plantes et n’avait que vingt six ans lorsqu’il est rentré à Munich !

Sur son portrait , von Martius apparaît un peu triste, ce n’est pas le cas de son œuvre jubilatoire sur les, palmiers.
Vous pourrez en savoir plus sur ce livre en allant sur le site : Taschen books palms.

Alain HERVE

Et à propos de Giacometti

24 août 2010,

Pour avoir vu récemment un de ses « Homme qui marche ». C’était je crois au musée d’art moderne Peggy Guggenheim à Venise. J’ai eu un reflexe d’agacement.
Vous, vous voyez cette quintessence de la silhouette du bipède humain en route pour nulle part et partout ?
Exprimant surtout selon ce qu’on y projette : le désespoir, l’affliction, l’accablement, l’indifférence, la régression, l’absence, la néantisation imminente.
Cette quintessence de l’expression artistique constituée d’une agglutination légère de touches de bronze. Comme un tartinage puéril ou légèrement débile ou scatologique.
Ces statuettes sentent ou bien la merde, ou bien l’absolu insignifiant dans leur maigreur ascétique.
Elles annoncent la pusillanimité de l’homme, sa qualité dramatique, la fin de sa matérialité, sa disparition imminente.
On peut considérer Giacometti comme un génie de son temps qui a su exprimer le moins que rien avec une touche de snobisme puritain. Un anti Leonard de Vinci avec sa silhouette d’homme solaire vitruvien.
Les salons ont frémi. Les intellectuels se sont pâmés, les snobs ont ovationné, les marchands se sont précipités, les escapistes de l’impôt ont acheté et fait monter la cote.
On vient de vendre chez Sotheby’s je crois, un de ces petits machins soixante quinze millions de dollars.
Laquelle somme ne signifie pas la valeur prodigieuse de l’objet d’art mais la valeur du support spéculatif. La « petite merde » aux yeux du public populaire devient un porte pognon disproportionné.
Les critiques d’art laissent entendre que la valeur de l’artiste et de son œuvre augmente en proportion de sa valeur marchande. Ils cautionnent ainsi la minable fuite devant l’impôt et le dévoiement de l’appréciation de l’œuvre d’art.
Giacometti devient un super man de l’expression artistique. L’égal d’un Enguerrand Quarton et son micro marcheur comparable au Couronnement de la Vierge de Villeneuve-lès-Avignon.
On peut ne pas suivre ce délire.
Et saluer cette exemplaire imposture.

On peut aussi avoir une autre appréciation de l’évènement et l’exprimer…

Alain HERVE

Projet d’un film sur la forêt tropicale humide

3 juillet 2010,

Nous vous invitons  à participer à votre manière au projet de Francis Hallé qui lance l’idée de réaliser un film sur les forêts primaires des tropiques avec le cinéaste Luc Jacquet.

On nous rabâche depuis des années que l’on dévaste les forêts primaires pour élever du bétail, pour planter du soja ou des palmiers à huile ou fabriquer du contreplaqué. Et c’est vrai.

Ces monuments vivants de la biodiversité, plus anciens que l’histoire de l’humanité, n’existeront bientôt plus. Francis Hallé qui célèbre avec passion depuis des années dans son enseignement et ses livres les arbres et les tropiques (voir son dernier titre : « La Condition tropicale ») qui fut l’inventeur de l’exploration de la canopée avec un dirigeable est le président de l’association « Forêts tropicales humides, le film ».

Allez les rencontrer sur leur site : « foretstropicaleslefilm.org ».