Par Alain HERVE
Frédéric Lenoir Fayard éditeur, 19€
Voilà un livre pour se rafraîchir les vieilles méninges du temps du catéchisme et de la communion solennelle, pour ceux qui sont passés par là. Comment s’est imposée au cours des siècles l’idée que cet homme, ce prophète, est le fils de Dieu descendu sur Terre.
Formidable entreprise théologique que Lenoir nous fait revivre depuis les témoignages des apôtres, des évangélistes… jusqu’aux querelles d’écoles, d’églises, de philosophes…
Formidable jeu de mots au fil des siècles, entre ceux qui se prévalent de leur pouvoir politique, de leur capacité intellectuelle, pour démêler ce qui appartient à Dieu et ce qui appartient à l’homme et dans quel ordre et dans quelle proportion.
L’homme Jésus né à Bethléem ou à Nazareth, né d’une vierge, né en moins trois avant JC. devient Dieu au fil de ses manifestations miraculeuses et de ses déclarations.
L’Eglise qui se constitue avalise et précise ce cheminement. D’une orthodoxie et d’un schisme à l’autre se précise cette identité complexe d’un seul Dieu en trois personnes. La Trinité du père, du fils et du Saint Esprit telle qu’elle nous est proposée aujourd’hui par l’Eglise chrétienne.
L’analyse de Lenoir est presque lumineuse au milieu de ce fatras. Mais ce qu’il ne fait jamais apparaître c’est le fait que cette religion privilégie d’abord l’Homme. Intronise l’Homme au rang d’un Dieu. Cette promotion se faisant au détriment de toutes les autres formes de vie.
Adieu toutes les expressions religieuses précédentes d’alliance avec la nature dans son ensemble: panthéisme. Adieu les millions de pactes infimes avec les arbres, les sources, l’orage… animisme, polythéisme.
Le monothéisme triomphe et impose sa domination de la nature par l’Homme-Dieu. Autorise tous les débordements, tous les asservissements, toutes les destructions. Les missionnaires chrétiens brûlent les idoles aux îles Marquises. Une civilisation entière disparaît. Les païens se trouvent « évangélisés».
A ceci près qu’il n’est pas évident que l’Evangile contienne ce message destructeur avant que l’Eglise l’ait interprété en faveur du Pouvoir politique auquel elle s’est associée depuis son accord avec l’empereur Constantin.
On aimerait que Frédéric Lenoir considère aussi cet aspect de la vie de Jésus l’Homme-Dieu.
Alain HERVE