A la recherche de la vraie nature d’Eva Joly

2 septembre 2011,

par Laurent Samuel

“Je sais que Nicolas Hulot partage mes objectifs en matière de protection de la biodiversité, la lutte contre le réchauffement climatique”, a déclaré Eva Joly le 19 août dernier sur Europe1. Une singulière déclaration car, si l’on peut faire bien des reproches à Nicolas Hulot, on doit reconnaître que ce dernier nous alerte depuis de longues années sur les dangers des émissions de gaz à effet de serre et de la destruction de la nature. En revanche, Eva Joly n’évoque publiquement ces problèmes que depuis son entrée en politique en 2009. Elle aurait donc été plus avisée de dire qu’elle partageait les objectifs de Nicolas Hulot (et de tant d’autres avant lui, comme Edouard Goldsmith ou Pierre Samuel) dans ces domaines, et non pas le contraire.

Une broutille peut-être… Mais (si l’on se base sur Google Actualités), Eva Joly, depuis son intronisation en juillet comme candidate d’EELV, a peu évoqué les thèmes de la nature et du climat. Fukushima oblige, la sortie du nucléaire semble avoir éclipsé dans les discours de Joly (et des leaders verts) la sortie des combustibles fossiles, tout aussi urgente pourtant.

Plus globalement, Eva Joly et son équipe semblent avoir décidé de centrer leur début de campagne sur des thématiques économiques (un choix légitime eu égard à la crise) et culturelles (mise en cause du défilé du 14 juillet, défense des langues régionales…) plus que strictement écologiques.

Un choix qui, si l’on se réfère au précédent de Noël Mamère en 2002, peut se révéler électoralement payant, puisque le député-maire de Bègles reste le seul candidat écolo à avoir dépassé la barre des 5 % à une présidentielle. Crédible sur la lutte contre la corruption, les paradis fiscaux et la spéculation financière, Eva Joly peut espérer rallier des électeurs trouvant le PS trop « mou » et Mélenchon trop « dur ».  Encore Noël Mamère, ancien élève d’Ellul et Charbonneau, puis journaliste environnement durant de longues années, était-il capable de parler OGM ou CO2 de façon convaincante.

Comme François Mitterrand qui, sans être socialiste, avait appris à parler leur langue (de bois), Eva Joly saura-t-elle intégrer l’écologie dans son discours de campagne ? Accordons le bénéfice du doute à une candidate qui, grâce en partie aux réactions honteuses de François Fillon et certains députés de droite mettant en cause l’ « ancienneté » de sa nationalité française après ses déclarations sur le défilé du 14 juillet, a plutôt réussi son entrée en campagne.

Mais si l’écologie ne revient pas en force dans les discours d’Eva Joly, un boulevard s’ouvrirait pour Corinne Lepage (laquelle, en 2002, avait obtenu 1,88 % des voix, contre 5, 25 % à Noël Mamère) qui a confié au « Nouvel Observateur » envisager de se présenter en « indépendante »… Chassez la nature, elle revient au galop…

Laurent Samuel