par Michèle Valmont
On rit beaucoup actuellement au Théâtre du Rond-Point, grâce à la pièce de Jean-Claude Grumberg .
En scène, un homme et une femme, Pierre Arditi et Catherine Hiegel, mariés depuis trente ans, dont les seules préoccupations sont la télévision (particulièrement les programmes animaliers), les repas et leurs interminables discussions, qui commencent invariablement par un « Moi je crois pas ! » lancé par l’homme, suscitant immédiatement l’opposition de sa compagne. Les sujets abordés sont très variés : du Yéti au 11 septembre, de l’Immaculée Conception à la voisine espagnole, de la vie après la mort à la taille du sexe des hommes…La dispute surgit à chaque réplique, drôle et acide.
Il ne s’agit pas de scènes de ménage banales mais plutôt d’un mode de vie, d’une vie « qui n’en est pas une », comme dit l’héroïne, mais qui est la seule possible pour elle. Le couple se complaît dans cet enfermement, accentué par l’intelligente scénographie minimaliste de Charles Torjman – une banquette nue et les éclairages violents de la télévision invisible -, il refuse tout voyage, toute sortie. Il est son propre univers, nourri d’échanges verbaux, manifestations de son profond attachement.
Catherine Hiegel et Pierre Arditi sont brillants, au sommet de leur humour, visiblement complices. Aucune vulgarité dans le ton de leurs conversations, même les plus scabreuses. Le texte de Grumberg est juste, précis, incisif. Dans sa banale absurdité, il atteint une dimension universelle.
Si nous y sommes si sensibles, n’est-ce pas simplement que ces deux êtres et leur télévision sont, peu ou prou, le reflet de chacun d’entre nous…
Michèle Valmont