Fascisme Economique

7 juin 2012,

par Alain Hervé

On assiste à un spectacle dont on ne connaît pas l’auteur. Les acteurs qui tiennent le devant de la scène sont sans visage, grandioses, hors d’atteinte des moucherons humains, ils s’appellent Milliards. Le show est intitulé : Economie.

Où l’on découvre que ce spectacle est panoramique, omniprésent, quadri-dimensionnel. Il entre dans nos vies. Les détermine entièrement. De notre premier à notre dernier souffle. Du berceau au cercueil.

Nous en sommes les sujets. De la même manière qu’autrefois nous n’en étions que les témoins, marginalement impliqués. Désormais l’économie nous gouverne. De Gaulle disait : « l’intendance suivra ». L’intendance a pris le pouvoir.

Nous sommes en dictature même si celle ci se camoufle dans des lambeaux de démocratie. Il n’y a plus de droite et de gauche, mais un parti unique : l’Economie. On s’en aperçoit lorsqu’une alternance résulte d’une élection. Rien ne change. Nous sommes en dictature, le Parti Economique règne. Les dictateurs sont une oligarchie discrète, rarement identifiée. Tel patron d’une entreprise multinationale, tel président de grande banque. Leurs bras armés s’appellent Fond Monétaire International, Banque Mondiale, et les agences des Nations Unies…

Vous vous souvenez du Fascisme, ce mouvement italien à l’origine, qui embrigada tout un peuple dans une entreprise autoritaire. Benito Mussolini son inventeur l’avait  caractérisé en une seule formule : « Tout pour l’Etat, rien hors de l’Etat, rien contre l’Etat ». Nous en sommes arrivés à la même formule mais le mot Economie remplace le mot Etat. Cela donne « Tout pour l’Economie, rien hors de l’Economie, rien contre l’Economie ».

Pathétique de voir nos élus à têtes d’énarques, ou simili énarques, faire des phrases, tenter de nous convaincre qu’ils vont « relancer la croissance ». L’invocation ne se formule plus en latin mais elle a à peu près autant de contenu qu’un « gloria in excelsis deo ».

Nos élus n’exercent plus le pouvoir, ils exercent le pouvoir que l’Economie leur impose. Ils ne l’avouent jamais. Ils font comme si ils jouissaient encore d’une autorité indépendante. Ils mentent.

Le dispositif s’est mis en place lentement, depuis une soixantaine d’années, sous couvert de planification, de concurrence, d’harmonisation, de coordination, de rationalisation, de modernisation, d’ajustement, de développement, (devenu depuis peu : durable)…

Aujourd’hui l’Economie inaugure un nouveau masque :  la Crise.

Cette crise elle l’a créée de toutes pièces en mettant en place des structures spéculatives qui échappent à tout contrôle politique. Par le biais des emprunts, elle a ligoté les gouvernements démocratiques qui ne disposent plus d’aucune capacité de choisir.

Nous sommes entrés maintenant dans le death row, dans le couloir de la mort.

L’Economie domine tous les comportements de l’espèce humaine. Elle met en danger la vie sous toutes ses formes : déforestation, surpêche, pollutions de l’air, de l’eau, de la terre, des semences, abjection de l’élevage intensif,  esclavage des hommes, épuisement des ressources, menaces nucléaires, urbanisation des terres arables, surpopulation…

Nous n’aurons plus longtemps à  attendre pour assister à la fin du spectacle.

A.H.