Relecture d’Orlando, Virginia Woolf

18 décembre 2012,

Relecture par Alain Hervé

Le "livre plastic" édité à Bruxelles en 1949

J’ai lu Orlando pour la première fois, je devais avoir 16 ou 17 ans Je l’avais trouvé au Monoprix des Galeries Lafayette rue Caumartin pour un prix très faible. C’étaient les premiers livres de poche en France. Années 49, 50. Je l’ai lu avec passion à cause de son ton romantique, qui pour Virginia Woolf n’était qu’un jeu littéraire, un pastiche de roman d’aventure et sentimental. Je l’ai pris au premier degré. Le sabrage de la tête de Maure, la vieille sous la glace au fond de la Tamise, l’immense château de Knole (qui existe en fait dans le Kent, et qui était la demeure de Vita Sackville West, l’amie de Virginia Woolf),   les amours avec Sacha, l’écriture du poème « le Chêne »… Puis l’invocation de « la Vérité, la Vertu, etc… » enfin ce changement de sexe  qui élève le héros au-dessus des trivialités du sexe, le rend asexué, angélique.

Après cette première lecture, je suis retourné au Monoprix et j’en ai acheté une demi-douzaine que j’ai distribuée à mes amis.

J’ai relu ce livre, je ne sais pas combien de fois au cours de ma vie. Et si j’ai pensé à te l’envoyer c’est que je viens de le relire une fois encore et qu’il me plaît toujours autant, bien qu’il ne soit plus seulement pour moi le livre de mon adolescence mais un livre de philosophie calme et heureux. Il a correspondu à une des rares périodes de bonheur dans la vie de Virginia Woolf.

Au cours d’une des lectures intermédiaires j’avais pris de notes, je devais avoir ton âge. J’écrivais :  « Orlando m’a servi d’Iliade et d’Odyssée et d’ordonnance du docteur Freud… Ce livre fut un phare dans ma vie… Orlando pour moi est un homme mais avec toutes les qualités d’une femme… Orlando a décidé de ma vie, de mon goût pour l’aventure, de la distance que j’ai pris avec la politique, la vie sociale… de mon goût du changement, du jeu… »

J’ai au fil des lecture noté des phrases qui m’enchantaient : … « Some grains of the Kentish or Sussex earth were mixed with the thin fine fluid which came to him from Normandy. »

Je l’ai d’abord lu en Français dans une très bonne traduction de Charles Mauron. Ce n’est que plus tard que j’ai réussi à le lire en Anglais, car ce n’est pas pour moi un Anglais facile. Mais c’est aussi avec ce livre que j’ai pris goût à la littérature anglo-saxonne et que je continue à la préférer à la française en général.

Je viens de découvrir sur Internet que le traducteur en Espagnol fut Jose Luis Borges. Ce qui est une belle référence pour ce livre.

Internet m’a aussi permis d’éclaircir de très nombreux points qui étaient restés obscurs pour moi dans le texte.

J’espère que ce livre t’intéressera autant qu’il m’a intéressé bien que tu ne sois plus un adolescent et pas encore un vieux sage.
Alain Hervé