Allez cultiver vos capacités oniriques et autres, que vous ne soupçonnez pas, à la Fondation Cartier, boulevard Raspail à Paris.
Sautez dans le vide de Ron Mueck. Un Australien bien malin.
Un Léonard de Vinci du banal, du moins que rien, du soit vu en passant, vous y attend. Pour une fois qu’une expression de l’art contemporain ne cultive pas l’imposture, allez voir. Allez.
C’est ça, et rien d’autre. C’est du tout cru de décoffrage, de la viande sous la peau, du bout d’humain à saisir. On croit les voir respirer. On les fixe attentivement pour être certain qu’ils ne bronchent pas. Ce sont des terriblement vivants, inanimés. Il faut s’y faire. Il ne sentent pas, ne suent pas. Ils ont un sexe et tout le barda, des poils, des rides, des cors aux pieds, d’infimes gonflements de la peau, des rougeurs, des varices qui menacent…
On préfère ne pas savoir comment il leur donne naissance, comment il les fabrique*. C’est un Dieu façonnant la glaise, la matière plastique, pour inventer de l’humain. Si Ron était une femme on dirait: il les fabrique dans son ventre en douce. Non il les enfante avec ses mains.
On leur ouvrirait le ventre pour y trouver tous leurs organes impeccables
Un malin cet Australien.
*Un excellent film muet de 55 minutes de Gautier Deblonde raconte le travail de Ron Mueck.