50 ans du Sauvage: N° 4 et 5 Eté 1973

7 novembre 2023,

Pour son numéro de Juillet et Août 1973, le Sauvage donne dans ses dernières pages une  importante tribune à André Gorz:

Le grand complot éco-fasciste

Illustrations de Maja.

Sous le pseudo habituel de Michel Bosquet, André Gorz développe une analyse des mécanismes du système capitaliste de 1973, de l’obsolescence programmée, des techno-structures et de leur relations à la croissance.

Il envisage parfaitement l’économie mondialisée qui va naître: les pays riches avec la consommation, les pays pauvres avec l’industrie et la pollution. Il explore ensuite les prospectives technologiques de 1973, autour du contrôle social, de l’éducation, de potentielles connexions cérébrales avec des ordinateurs, ce qui résonne singulièrement aujourd’hui, lorsqu’on sait que les interfaces neuronales d’Elon Musk, projet de connexion cerveau/ordinateur, viennent d’être autorisés cette année 2023.

Il évoque également l’émergence d’une économie capitaliste de l’immatériel, de l’éducation, de la sexualité, jusqu’à la médecine, notamment psychiatrique, tous les secteurs dont on sait que l’IA va réaliser les perspectives les plus futuristes.

Pour télécharger le PDF du Numéro 4/5 de juillet Aout 1973:

Attention, fichier lourd, 90 Mo: Le Sauvage 4/5

Vive le bidet

22 octobre 2023,

On se souvient de la ruée panique sur le papier toilette au début du premier confinement lié à la pandémie de covid (https://www.lesauvage.org/2020/03/la-societe-est-a-la-raie/). Les personnes nanties, occidentales, qui ont réalisé qu’il y avait peut-être offense à la planète à chier dans l’eau potable se mettent, lentement, aux toilettes sèches.
Mais dans l’usage pionnier de ce type de latrine on utilise encore du papier. Notre confrère le magazine We Demain dénonce le fardeau planétaire que représente le papier Q avec un questionnaire didactique.
Si l’on se fie aux chiffres avancés par We Demain, en France nous consommons en moyenne 100 rouleaux de 60g par an et par personne (soit dit en passant deux fois moins que les Portugais). La fabrication d’un rouleau de papier toilette nécessite 168 litres d’eau. Notre consommation annuelle de cet auxiliaire d’hygiène se monte donc à 16800 litres, soit une dépense journalière de 46 litres d’eau. We Demain indique qu’une ablution par douchette consomme en moyenne 0,6 litres d’eau. Quelle que soit la fréquence d’utilisation journalière des toilettes, on voit tout de suite l’énorme économie que représenterait l’abandon du papier en faveur du rinçage à l’eau.
Le ton léger de cet article ne doit pas laisser croire qu’il relève de la fiction futuriste.
Si l’on prend au hasard le catalogue online d’un grand magasin de bricolage, on peut lire ; Douchette pour toilette : la sélection produits XXX de ce dimanche au meilleur prix ! Retrouvez ci-après nos 102 offres, marques, références et promotions en stock prêtes à être livrées rapidement dans nos magasins les plus proches de chez vous.La société de consommation peut parfois vous aider à moins consommer, pensez-y !

La Rédaction

PS : Pour des toilettes sèches, il vous faudra un bidet séparé. Une recherche rapide vous révèlera les bienfaits multiples du bain de siège froid.

Interdiction d’utiliser l’eau de pluie au jardin ! ! ! ! ! ! !

1 octobre 2023,

Une nouvelle incroyable que l’on a du mal à comprendre. Depuis le 31 août dernier, date de publication au Journal Officiel du décret n° 2023-835 du 29 août 2023, il n’est plus possible d’utiliser l’eau de pluie pour arroser les jardins, ni-même pour tout usage intérieur en maison, chasse d’eau ou lavage des sols par exemple. Ni-même après traitement de potabilisation. Interdit chez soi, mais aussi dans un tas de lieux publics. On pense à tous les Tiers-Lieux et éco-lieux où la récupération d’eau de pluie est un principe de base…  

C’est une incroyable nouvelle, surtout au moment où la perspective de sècheresses et donc de pénuries longues nous incite à mettre en place ou à améliorer des dispositifs de récupération d’eau. Ces dispositifs sont vendus et installés par des entreprises partout en France.

Des dizaines d’ouvrages sur le sujet ! des centaines d’entreprises posant des dispositifs !

Ce décret mélange de façon incompréhensible les eaux de récupération issues du traitement des eaux, et les eaux de pluie. Voici les extraits les plus importants :

– L’article définissant l’eau de pluie.

« Art. R. 211-124.-Pour l’application de la présente section, on entend par “ eaux de pluie ” celles issues des précipitations atmosphériques collectées à l’aval de surfaces inaccessibles aux personnes en dehors des opérations d’entretien et de maintenance.


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Agrivoltaïsme ?

28 septembre 2023,

Panneaux photovoltaïques sur de la vigne. Cliché Sunagri.fr

Photovoltaïque sur des terres naturelles, agricoles ou forestières : nous ne tomberons pas dans le panneau !
Alors qu’Emmanuel Macron affirme vouloir travailler avec les agriculteurs pour leur permettre d’avoir « par l’agrivoltaïsme » une réponse à la baisse des rendements, plus de 200 organisations rejettent ici cette « vision d’une transition écologique allant vers une société de surconsommation ultra-connectée » et appellent à une opposition massive à tous ces projets photovoltaïques.
Nous, organisations en lutte contre les centrales photovoltaïques sur les terres agricoles, naturelles, forestières et en milieux aquatiques, refusons les dérives des énergies renouvelables prises dans des logiques de marché.
Nous récusons le terme « agrivoltaïsme », qui relève du marketing et vise à légitimer un opportunisme foncier et financier dans un contexte difficile pour le monde paysan. « L’agrivoltaïsme » éloigne de l’autonomie : il ajoute à la dépendance au complexe agro-industriel (industries de la grande distribution, des engrais, pesticides et semences, machines agricoles, banques, organisations syndicales défendant leurs intérêts…) une autre dépendance plus moderne, car porteuse de l’image de l’énergie renouvelable.
Nous dénonçons la diversion introduite dans la loi d’Accélération des Énergies renouvelables (AER) qui permet de distinguer un « agrivoltaïsme » soi-disant en synergie avec l’agriculture, d’un autre photovoltaïque qui irait sur des terres dîtes « incultes ». Or d’une part ces deux catégories relèvent de la même pratique marketing permettant aux industriels de s’accaparer du foncier, et d’autre part « c’est bien sur des terres considérées comme pauvres que s’est en grande partie développé l’élevage » (1). Et alors même que les lobbies œuvrent afin que les textes légaux considèrent de moins en moins ce phénomène comme de l’artificialisation : « on va vous louer le volume d’air au-dessus de votre parcelle pendant trente ans » (2) déclare ainsi cyniquement un prospecteur, nous affirmons que des tonnes de métal dénaturent les espaces agricoles, naturels et forestiers. Et quand bien même dans leurs discours, la production d’électricité est cyniquement présentée comme étant « secondaire », tandis que le but premier serait d’aider l’agriculture face au changement climatique en créant de l’ombre, nous affirmons que la rente issue de la production d’électricité est bien l’unique raison de ces projets. Surtout, il est passé sous silence qu’ « en terme de résilience, les pratiques agroécologiques de couverture du sol, d’amortissement climatique avec des arbres, de diversification en réduisant la monoculture et la densité de plantation des fruitiers apportent plus de sursis que des panneaux » (3).
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50 ans du Sauvage: le numéro 3 de l’été 1973

17 septembre 2023,

Nous diffusons aujourd’hui le PDF du numéro 3 du Sauvage, de juin-juillet 1973, titré “Travailleurs de tous les pays, reposez-vous !”. Ce numéro résonne particulièrement bien 50 ans plus tard, à  l’heure de la “bifurcation” qui agite les milieux du travail.

On y trouve, entre autres articles sur la consommation, sur les essais nucléaires français, sur la répression des Indiens aux USA, sur la captation de terre par l’armée ou l’urbanisation sauvage, une généreuse tribune de Konrad Lorenz contre la croissance et la destruction de la nature, ainsi qu’un éloge inconditionnel du vélo par Serge Moscovici, théoricien de l’écologie politique et pionnier de l’écoféminisme.

Le PDF du numéro peut se télécharger ici ( PDF-39 Mo)

François Roddier

30 août 2023,

François Roddier nous a quittés. Le Sauvage avait eu l’occasion de mentionner son nom et l’apport de sa pensée à trois reprises, à propos du transhumanisme, des singularités et de l’évolution. Les fidèles de son blog (il y en avait forcément) savaient depuis quelques mois qu’il n’allait plus assez bien pour continuer à nous faire profiter de ses réflexions. Nous ne savons pas combien de temps ce blog sera encore accessible et le plus simple nous a semblé d’en recopier la dernière page, pour laquelle nous remercions ses proches.

Aux lecteurs de François.

Il nous a quittés en ce mois d’août. Je vous remercie de l’intérêt que vous avez porté à ses travaux, et à travers lequel, en le (re)lisant, vous continuez à le faire vivre. S’il a marqué par sa recherche en astronomie et son lien avec ses étudiants, ses années de retraite ont été enrichies par les lectures et réflexions inscrites sur ce site au fur et à mesure qu’il les élaborait.

Je dépose ci-dessous quelques liens aux présentations disponibles dans lesquelles il a résumé sa pensée post-retraite. D’autres liens, pdf, et autres documents sont présents dans les billets mêmes.

Claude Roddier

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Quelques conférences qui existent sur YouTube:
La thermodynamique de l’évolution : du Big Bang aux sciences humaines (Institut d’Astrophysique de Paris, 5 octobre 2010) 90′
La thermodynamique des transitions économiques (Shift Project, 12 mars 2015), 77′
Thermodynamique et évolution (Observatoire Midi-Pyrénées, 19 septembre 2017), 74′
Thermodynamique et économie (École des Mines Paris Tech, 12 avril 2018), 30′

Ces trois articles disponibles en ligne publiés dans la revue Res-Systemica de l’AFSCET:
« Thermodynamique et économie, Des sciences exactes aux sciences humaines » (2014)
« La thermodynamique des transitions économiques » (2015)
« L’équation de van der Waals appliquée à l’économie » (2017)

Ses chapitres publiés dans ces collections:
Sous la direction de Pablo Servigne et Raphaël Stevens, Aux origines de la catastrophe: Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? (Les liens qui libèrent, 2020)
Sous la directions d’Agnès Sinaï et Mathilde Szuba, Politiques de l’Anthropocène: Penser la décroissance. Économie de l’après-croissance. Gouverner la décroissance (Les Presses de Sciences-Po, 2021)

Ses livres sur la thermodynamique, disponibles aux éditions Parole:
Le pain, le levain, et les gènes (2007)
Thermodynamique de l’évolution: un essai de thermo-bio-sociologie (2012)
De la thermodynamique à l’économie (2018)
The Thermodynamics of Evolution, trans. Steve Ridgway (2020)

et cet article récent en anglais, co-écrit avec Mireille Roddier qui répondait à la question de Didier Pillet, « Alors que l’accès à l’énergie se restreint, l’économie mondiale est-elle à la veille d’un changement systémique ? »:
« Energy flows and the self-organization of societies as dissipative structures » (Annales des Mines, 2023)

ainsi que ce bel article de Matthieu Auzanneau dans Le Monde, lors de la parution de Thermodynamique de l’évolution:
« François Roddier par-delà l’effet de la Reine Rouge” (Le Monde, 30.10.2013)

La gentrification de la montagne

27 août 2023,

Heureux propriétaire depuis 20 ans d’une grange isolée dans les Alpes à 1800m d’altitude,  j’ai constaté ces dernières années que les hameaux et habitats isolés du coin, abandonnés depuis les années 1950 ou 1960, sont récemment achetés par des familles fortunées.

La plupart de ces nouveaux propriétaires semblent tout à fait respecter l’environnement montagnard. Ils restaurent correctement les bâtiments dans les styles montagnards traditionnels, souvent à grands frais, car les travaux en montagne sont très coûteux, aussi bien par les prestations que par les matériaux. C’est un vrai plaisir de revoir des bardeaux de mélèze sur les toits à la place des tôles ondulées, de voir des restanques restaurées en pierre sèche, de nouveaux arbres plantés, des chemins entretenus. Il y a toujours, bien sûr, l’inévitable beauf qui se met à bétonner son bâtiment tri-centenaire pour abriter son affreux SUV dernier cri et son détestable quad, sans parler de ceux qui voudraient construire des piscines, mais cela est encore rare sur les terrains d’altitude.

Un bulldozer n’est jamais loin.


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Jour du dépassement 2023

4 août 2023,

Le jour où nous avons utilisé plus de ressources que la planète ne peut en fournir pour 2023 était cette année le 2 août. C’est un très léger progrès et si l’on veut rester du côté du verre à moitié plein, on peut noter une stabilisation de l’empreinte humaine qui n’est pas due seulement au covid. Il ne faut pas sous-estimer cependant la dégradation de l’habitabilité de la Terre que cela implique.

L’avancée du jour du dépassement depuis 1971

Retour sur le rapport Meadows

28 juin 2023,

J’ai découvert hier un site internet que j’ai trouvé riche et intéressant, il s’intitule Et vous n’avez encore rien vu. Critique de la science et du scientisme ordinaire.
Ce n’est pas jeter le discrédit sur ce site que de relever mes désaccords avec un article d’Arnaud Milanese daté du 18 juin 2023 et intitulé « Le rapport Meadows, 2023 ou les limites des Limites de la croissance ». Arnaud Milanese (AM) est philosophe et Maitre de Conférences à l’école Normale Supérieure de Lyon, il a choisi de dénoncer l’idéologie sous-jacente au rapport Meadows, un peu comme si ce rapport était le manifeste d’un mouvement d’écologie politique. Pour moi l’essentiel de ce rapport réside plutôt dans son aspect réfutable, que l’on peut ainsi qualifier de scientifique. Les auteur-es (la principale étant Dana Meadows, aujourd’hui décédée) ont fait des prédictions basées sur l’utilisation du modèle informatique World3. Ce modèle était cohérent avec les données quantitatives choisies, de 1900 à 1970, données sur les ressources non renouvelables, la nourriture, les services, la production industrielle, la pollution, la population. Le rapport Meadows exposait les prédictions du modèle pour ces différentes données jusqu’à la fin du XXIe siècle. Ce qui a réellement une grande force est la prédiction d’un déclin rapide de la population mondiale à partir de 2030 (Fig. 1).

Fig 1. Réexamen du modèle World3 publié initialement par Meadows et al en 1972. Ce modèle permettait d’intégrer les relations entre population et ressources, nourriture, services, production industrielle et pollution de 1900 à 1970. Ses prédictions jusqu’en 2100 sont en pointillés. La comparaison entre prédiction et réalité a été figurée sur ce graphique par Linda Eckstein- pour la revue en ligne du Smithsonian Institute – à partir des données publiées par G. Turner pour la période 1970-2000 (en traits pleins). Cette mise à l’épreuve du modèle conforte la prévision d’un effondrement prochain du système économique sans même que la crise écosystémique globale soit prise en compte.
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