Archive pour mars 2011

Pourquoi sauver les serres chaudes d’Auteuil ?

10 mars 2011,

par Hadrien Gens

En réponse au projet de transformer le jardin d’Auteuil en une annexe de Roland Garros et en écho à la pétition, toujours en ligne, s’opposant au projet et qui a recueilli plus de 40 000 signatures.

Parmi de très nombreuses argumentations possibles pour sauver les serres chaudes du jardin d’Auteuil, voici une raison, non rationnelle mais peut-être raisonnable, sans données ou chiffres précis mais suggérée par la pensée rafraîchissante et en un sens sauvage d’un forestier américain amoureux de la nature : Aldo Leopold. Si la question est de savoir pourquoi protéger, sauvegarder des orchidées plus que centenaires ou un pistachier rarissime d’Afrique du Nord, alors nous faisons nôtre cette déclaration subversive que Leopold lance au tout début de son Almanach : «  Pour nous, minorité, la possibilité de voir des oies est plus importante que la télévision, et la possibilité de trouver une pasque est un droit aussi inaliénable que la liberté d’expression ». Y a-t-il un rapport entre la télévision et Roland Garros, entre une oie et un rarissime pistachier, ou encore entre une simple pasque Pulsatilla et une orchidée plus que centenaire ? – demandera-t-on. Le rapport, si l’on suit le forestier, n’est autre que la possibilité d’observer la nature. Et l’oie comme l’orchidée, en effet, font partie de ces quelques réalités qui peuvent encore mettre en branle notre « faculté d’observation ». (suite…)

Sauvages à vendre

9 mars 2011,

Un de nos lecteurs a eu la gentillesse de nous adresser un courriel pour nous demander comment il pouvait s’abonner au Sauvage papier. Nous avons du lui répondre que le Sauvage papier n’existe plus . Nous sommes désormais impondérables mais restons succulents.

Nous vous signalons si vous êtes amateurs effrénés du Sauvage que vous trouverez des numéros de l’ancien Sauvage des années 70 et 90, sur Price Minister ou sur Amazon , à des prix accessibles. Bonne chasse.  Si vous découvrez d’autres sites de mise en vente signalez les nous.

Les Sauvages Associés

Les rats

9 mars 2011,


Gras, dodus, bouffis, ils constituent une société animale opulente et inébranlable dans la cité humaine en décomposition

par Jean-Louis Hue

Deux rats musardaient dans une cage de laboratoire. Le premier, allongé sur le sol, faisait la sieste. L’autre, souriant et épanoui, actionnait avec sa patte un petit levier. Il s’arrêta soudain, comme frappé par une illumination, et, se détournant vers son camarade, lui lança : « Mon gars, je crois que nous avons réussi à conditionner les hommes. Chaque fois que j’appuie sur ce levier, ils me donnent en récompense une petite boulette de nourriture. » (suite…)

A l’écart…

8 mars 2011,

Le monde entra en convulsions. On pronostiqua à tors et à travers, les prophètes médiatiques vaticinaient, les voiles se déchiraient, la vérité crue éclairait les arrières-cours, les culs de basses-fosses et de basses-oeuvres.
Certains, parmi les meilleurs s’ensauvagèrent, d’autres se  retirèrent, hors des villes, dans des monastères, cultivant l’amitié et un épicurisme bien tempéré. Ceux-là, sur les pentes du Monte-Véritas dansaient tout nus au soleil, ceux-ci bêchaient leur jardin et élevaient des oiseaux-chanteurs…
Georges pérégrinait de ci de là, comme il avait l’humour taoïste, il réjouissait ses hôtes d’histoires saugrenues dont le sens profond  se révélait bien après son départ…

La femme et/est l’écologie

8 mars 2011,

A l’occasion de la Journée de la Femme nous reproduisons cet article publié dans le  Sauvage n° 43, 1er juillet 1977


La femme semble plus douée que l’homme pour pratiquer l’écologie : son corps sait s’adapter aux modifications de l’environnement et son esprit perçoit avec acuité les choses du quotidien, les vibrations de la vie.

Un manifeste d’Anne-Marie de Vilaine, avec le concours bénévole de Sandor Ferenczi et Virginia Woolf.

La femme et l’écologie… Pourquoi pas la femme est l’écologie ? L’organisme féminin et les valeurs féminines pourraient très bien symboliser l’écologie aujourd’hui : la femme s’érige comme un manque qui est en passe de dominer (plutôt de miner) notre civilisation bien davantage que le symbole phallique omniprésent.

Si l’écologie, c’est d’abord rétablir et préserver l’équilibre naturel de la planète en instaurant les relations de l’homme et de l’environnement — et des hommes entre eux — sur un mode d’adaptation mutuelle et non unilatérale, un véritable renversement des valeurs est devenu nécessaire.

Conquérir, exploiter, tirer profit… Depuis l’origine des temps, l’homme a continué sur sa lancée. Il est maintenant au sommet de la spirale folle du progrès, prêt à basculer dans le cosmos, tant il a perdu contact avec la terre. Homme-machine, il a des choses de la vie (et de la mort), de son prochain et des rapports humains, une notion plutôt abstraite, aussi confie-t-il à des spécialistes le soin d’analyser, et si possible, de prévoir et de codifier ces phénomènes dérangeants. D’où l’essor des sciences humaines…

(suite…)

Une heure au Jardin des Plantes

8 mars 2011,

En entrant dans le Jardin des Plantes par le numéro 10 de la rue Buffon, un cerisier d’hiver florissant, aux tons rosés, vous accueille et vous salue joyeusement. Quelques pas de plus et c’est un cerisier de l’Oregon, tout blanc, éclatant, qui vous invite à prolonger la balade. Ce blanc est une fête, une célébration.

(suite…)

Les abeilles

4 mars 2011,

par Jean-Louis Hue

reprint Le Sauvage 1977


Ce n’est pas la société communautaire et socialiste que l’on croyait mais une société de profit et de rendement

Leur langage reste indéchiffrable

L’herbe était jaune, les rhododendrons, bleus, et les pâquerettes, vertes. Assis au milieu d’un champ, le professeur américain Thomas Eisner, de l’université de Cornell, regardait les couleurs de l’univers avec les yeux d’une abeille. Grâce à une caméra TV qui enregistrait, à la manière de l’insecte, les rayons ultraviolets. Chaque fleur lançait des reflets éclatants et la nature se transformait en un étonnant light-show. Thomas Eisner s’extasia : il découvrait soudain deux fois plus d’espèces florales qu’il n’en avait repérées auparavant.

(suite…)

Le jardin du Luxembourg

2 mars 2011,

Comment fonctionne un jardin public

reprint Le Sauvage, n° 71, été 1980 (on constatera quelques anachronismes résultant de l’époque de rédaction de l’article mais qui ne nuisent pas au charme de cette promenade écologique pour parisiens captifs de l’urbs.)

par Françoise Biro

(voir l’hommage à Françoise dans la rubrique Gloire à nos illustres pionniers)

Le Luxembourg est comme une maison bourgeoise bien organisée : les jeux d’un côté, le sport de l’autre, l’agrément au milieu. 25 ha de parterres fleuris en plein Paris, 3 500 arbres et deux terrasses, un bassin, deux fontaines, une centaine de statues dont vingt reines de France, des promeneurs tranquilles, des enfants, beaucoup d’enfants, de vieux messieurs seuls, des étudiants qui lisent, des dames frileuses, le frisbee et le tennis, de petits kiosques à jouets. Voilà pour l’endroit. Moins compliqué qu’il n’y paraît. À l’envers, ce sont des chiffres, du personnel, des espèces végétales, un règlement, une administration, des patentes. Tout ce que le public ne voit pas.

Le Luxembourg est un jardin privilégié. Presque un lieu privé, puisqu’il appartient au Sénat. À ce titre, il est l’objet de soins que lui envient d’autres jardins publics.

Jusqu’à 100 000 Parisiens s’y côtoient certains jours d’été. Ils trouvent là une place au soleil. Et aussi, sans tomber dans le folklore de la barbe à papa, la bonhomie champêtre de certains lieu de kermesse.

Peut-on être amoureux d’un jardin ? Pour qui a la faveur de le fréquenter assidûment, le Luxembourg est un lieu irremplaçable. On vient y croquer une pomme. On le traverse d’un point A à un point B. Il s’y passe à chaque instant quelque chose. On peut y louer un voilier pour 5 F l’heure. Les vieux s’assoupissent au soleil tiède, sous les palmiers devant l’Orangerie, comme à Monte-Carlo.

(suite…)

Le jardin-planète

1 mars 2011,

Chapitre II


Nous republions cette étonnante analyse de Pierre Lieutaghi, parue dans Le Sauvage, n° 71, été 1980 . A sa relecture nous avons été stupéfaits de la qualité de sa vision prémonitoire. Rarement un texte manifeste une telle force, même si l’on y rencontre quelques obscurités. C’est pour nous un texte fondateur.

Les Sauvages associés

Pour en finir avec la famine, la guerre, l’économie de marché, le technocratisme giscardien ou rocardien, la pollution, l’industrie, le chômage et le reste, il faut envisager la solution jardin

Il n’y a que deux façons de gérer la planète. L’une mène au jardin. L’autre à l’usine. L’une à la multiplication de la vie, l’autre à la consommation de la vie.

Le jardin, c’est l’unité écologique de base. La cellule normale de la Terre humanisée. Ce n’est qu’à l’échelle du jardin, c’est-à-dire de l’écosystème complice, sol vivant étroitement associé à l’arbre et à l’animal, qu’un rapport à double sens est possible, bénéfique au milieu et à son gestionnaire humain.

Le jardin dont il est question ici n’appartient pas aux normes du loisir. Ce n’est pas l’espace-tampon entre le réel (la ville) et le mythe (le sauvage). C’est le lieu d’un échange en profondeur, d’une symbiose, la rencontre de l’intelligence des sens du vivant et des énergies du sol et de la végétation. La représentation graphique de cette symbiose sur la Terre, c’est l’espace jardiné. Tout le reste, sous dépendance humaine, est déséquilibre. Le jardin, cellule verte à multiplier la vie, peut seul restaurer le visage de la Terre, lui assurer une jeunesse pratiquement éternelle.

(suite…)